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Autour du « Puits de Moïse ».Pour une nouvelle approche
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Etudes & travaux

Autour du « Puits de Moïse ».
Pour une nouvelle approche

Dijon, colloque, 16-18 octobre 2008.
Sophie Jugie et Daniel Russo
p. 237-242

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Index de mots-clés :

Puits de Moïse

Index géographique :

France/Dijon
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Texte intégral

  • 1 L’art à la cour de Bourgogne. Le mécénat de Philippe le Hardi et de Jean sans Peur (1364-1419), Par (...)

1À l’occasion de l’exposition présentée au Musée des Beaux-Arts de Dijon 1, puis au Museum of Arts de Cleveland, Sophie Jugie et Stephen N. Fliegel avaient rouvert un certain nombre de dossiers autour de la création artistique des années 1400, très bien connus par ailleurs, mais jamais approfondis ainsi de manière scientifique. À partir de l’étude des polychromies et des travaux de restauration menés sur le Puits de Moïse de Claus Sluter (Haarlem, vers 1340/1350, mort à Dijon 1405/1406), au croisement d’enquêtes nouvelles, l’importance de la Croix placée au centre du grand cloître de la Chartreuse de Champmol n’en parut que plus décisive, tant du point de vue de la commande que de celui de sa réalisation monumentale.

  • 2  R. Prochno, Die Kartause von Champmol. Grablege der burgundischen Herzöge 1364-1477, Berlin, 2002  (...)
  • 3  D. Russo, « L’iconographie vétéro-testamentaire à la cour de Bourgogne » et Sh.-C. M. Lindquist, « (...)
  • 4  S. Nash, « Claus Sluter’s “Well of Moses” for the Chertreuse de Champmol reconsidered », I et II, (...)
  • 5  Pour un tableau d’ensemble, voir M. Jannet et F. Joubert (dir.), Sculpture médiévale en Bourgogne, (...)

2Les travaux récents de Renate Prochno et de Sherry C. M. Lindquist, notamment, ont montré toute la complexité du processus engagé sur un chantier, du reste, très bien documenté 2 : l’élaboration du projet, l’organisation des hommes, l’origine et l’agencement des matériaux, tout relève d’interventions multiples sur un centre artistique princier, où la cour de Bourgogne tint un grand rôle, mais non exclusif, aux côtés d’autres acteurs plus traditionnels, tel l’ordre des Chartreux. Envisageant la création des sculptures du Puits et l’insistance sur les effets visuels recherchés, Daniel Russo et Sherry C. M. Lindquist se sont efforcés de comprendre la pertinence de l’ensemble pour les contemporains, par rapport à l’emplacement des figures sculptées et au support livresque de ces réalisations 3. Enfin, partant d’un examen minutieux des restes sculptés du Puits de Moïse et de l’analyse des documents conservés, Suzie Nash aboutit à la relecture complète du Calvaire et de son insertion possible dans le complexe monumental de la Chartreuse, en posant les bonnes questions sur ce qu’il pouvait y avoir de dressé sur la plate-forme au-dessus des prophètes 4 : un calvaire et une composition de groupe, ou un crucifix avec au bas de la croix sainte Marie Madeleine agrippée de ses mains au montant vertical du support. Quels rapports, stylistiques et iconographiques, supposer alors entre la grande « Croix » et la suite des six prophètes sur le pilier octogonal ? La discussion méritait d’être relancée 5.

  • 6  C. Monget, La Chartreuse de Dijon, d’après les documents des archives de Bourgogne, Montreuil-sur- (...)
  • 7  R. Recht, Le croire et le voir. L’art des cathédrales (XIIe-XVe siècle), Paris, 1999, en part. p.  (...)

3Échelonnés de mars 1393 jusqu’à la fin de l’année 1404 ou jusqu’en 1405 6, les travaux mènent à l’installation des trois grandes sculptures de David, de Moïse et de Jérémie, en juillet 1402, tandis que la pierre nécessaire à l’exécution des trois autres « ymaiges » des prophètes n’est pas fournie avant novembre 1403, au moins : ce sera la seconde série, qui suivra à la fin de l’année 1404, voire en 1405. Et dès 1411, un pavillon de bois au dôme supporté par des colonnes est substitué à une série de clôtures provisoires. La collaboration des différents artistes au projet d’ensemble, Claus Sluter, puis, à partir de la fin de l’année 1396, Mas de Rot (Roc), Claus de Werve, neveu de Sluter, et, à compter de mars 1401, Rogier de Westerhen, autorise à poser la question de la transmission des formes et des types sur le chantier et celle des modèles suivis 7. On peut, en effet, remarquer que les « anges de douleur et de compassion », sur le Calvaire, attribués dans les documents anciens, avec beaucoup de vraisemblance, à Claus de Werve, se caractérisent par une gestique qu’on retrouve, par exemple, sur certains des pleurants dans le tombeau de Philippe le Hardi, mais que le style de leur drapé aux arêtes vives est également bien visible sur deux statuettes conservées, aujourd’hui, au musée de Cleveland. Il est difficile de dire si Sluter a transmis à son neveu des projets dessinés, donc une « typologie » et, de même, pour les autres images sculptées.

  • 8  K. Morand, Claus Sluter, Artist at the Court of Burgundy, Londres, 1991, en part. p. 91-110.
  • 9  E. Konigson, L’espace théâtral médiéval, Paris, 1975 ; et surtout, H. Rey-Flaud, Le cercle magique (...)

4Au cours du XVe siècle, pour la grande Croix, Champmol reçut des indulgences pour favoriser l’instauration d’un pèlerinage au centre du grand cloître, et son développement, en 1418, renouvelées successivement en 1432, puis en 1445. C’est dire aussi l’importance capitale pour l’espace de dévotion que suscita la mise en place d’un tel monument, tant du point de vue des chartreux, que de celui du duc et de la duchesse, de leur cour, puis des pèlerins qui y venaient. Dans son livre, Sherry C. M. Lindquist interprète, avec justesse, tout ce dispositif ainsi aménagé en termes de visualité et d’effets produits sur les principaux acteurs impliqués dans tout un processus, qu’elle reconstitue, de conformation d’une petite société à son espace de croyances et de dévotions. Il y a déjà quelque temps, Katleen Morand avait cru opportun de distinguer, pour l’iconographie des prophètes et à l’intérieur de cet espace de dévotion, une articulation forte entre le registre intermédiaire et celui du haut, qu’elle voulait lire comme une association étroite de l’ancien au nouveau Testament. Elle soulignait, de plus, qu’à l’inverse de la scène de théâtre médiéval et de ses acteurs, les prophètes demeuraient fixes, immobiles, et que les pèlerins et les dévots tournaient autour d’eux 8. Les montages scéniques de l’espace théâtral au Moyen Âge, et particulièrement ceux des pièces à mystères jouées au XVe siècle, semblent avoir été très différents de cette vision des choses : les acteurs restaient sur des mansions au milieu des spectateurs qui se déplaçaient, tout comme les visiteurs de Champmol autour du puits dans le grand cloître 9. De plus, le tournoiement des prophètes signale, du point de vue du projet de décor sculpté, une réflexion toute spéciale sur le moment historicisé qu’ils figurent, comme une étape dans un véritable chemin de croix spirituel, personnel ou collectif, suivant les visiteurs ou les occasions.

  • 10  Cette donnée reste fondamentale si l’on veut comprendre, un jour, la forme et le décor peint, scul (...)
  • 11  I. Rosier-Catach, La parole efficace. Signe, rituel, sacré, Paris, 2004. Voir également R. Recht, (...)

5Parmi celles-ci, les occasions liturgiques ne doivent pas être oubliées, notamment la liturgie (mal connue) pratiquée à Champmol 10, pour cerner au mieux l’insertion des images sculptées dans leur cadre de fonctionnement et de pratiques quotidiennes, en particulier les rituels de Pâques, autour des grands temps forts de l’adoratio, de la depositio, et de l’elevatio Crucis, qui se généralisent alors partout et qui affirment, avec en leur centre le rite eucharistique, la présence sacramentelle du Corpus Christi. Celui-ci est, désormais, vu et reconnu comme le « signe qui fait ce qu’il signifie », signe efficace, mais aussi énoncé « opératif », pour reprendre les termes de la belle analyse d’Irène Rosier-Catach 11. La série des prophètes est aussi à comprendre dans ce mouvement précis, en relation avec la partie supérieure du monument, mais selon une voie qu’il faut encore préciser.

6Au carrefour de ces interprétations nouvelles, souvent divergentes les unes des autres, mais complémentaires, en collaboration avec l’université de Bourgogne (ARTeHIS umr 5594), le musée des Beaux-Arts de Dijon et la Société des amis des musées de Dijon, a été prévu un colloque réunissant les chercheurs déjà cités, et d’autres, historiens en particulier, archéologues, historiens de l’art, qui travaillent sur les aspects du mécénat ducal et princier, sous la présidence de M. Roland Recht, professeur au Collège de France.

7Programme du colloque

8Jeudi 16 octobre 2008

  • Roland Recht (Collège de France), Discours inaugural

  • Sophie Jugie (MBAD), Daniel Russo (université de Bourgogne, ARTeHIS  UMR 5594), Introduction

  • Jacques Paviot (université Paris XII/Val-de-Marne), Philippe le Hardi et le milieu ecclésiastique

  • Les données documentaires et archéologiques (1), modérateur Hervé Oursel (Société des amis des Musées, Dijon)

  • Éric Pallot (architecte en chef des Monuments historiques), Isabelle Denis (DRAC de Bourgogne), Michel Huynh (musée national du Moyen Âge, Paris), Jean Délivré (restaurateur), La restauration du Puits de Moïse, 1999-2003

  • Les données documentaires et archéologiques (2), modératrice Fabienne Joubert (université Paris IV/Sorbonne)

  • Renate Prochno (université de Salzbourg), Histoire et reconstitution du Puits de Moïse

  • Judith Kagan (direction de l’Architecture et du Patrimoine, Paris), La documentation iconographique sur le Puits au XIXe siècle

  • Suzie Nash (Courtauld Institute of Art, Londres), Le Puits de Moïse reconsidéré

  • Véronique Boucherat (université Paris X/Nanterre), Le buste du Christ en croix du Musée archéologique de Dijon

9Table ronde

10Conclusion de la journée, Fabienne Joubert

11Vendredi 17 octobre

  • Iconographie et spiritualité religieuse, modérateur Jacques Paviot (université Paris XII/Val-de-Marne)

  • Suzie Nash, Étude iconographique et reconstitution du Puits

  • Daniel Russo, Ancien et nouveau Testament

  • Sherry C. M. Lindquist (Warburg Institute, Londres), Le Puits de Moïse dans l’espace et les dévotions des chartreux

12Table ronde, modérateur Alain Girard (Musée d’Art sacré, Pont-Saint-Esprit)

13Conclusion de la matinée, Jean Richard (Institut de France)

14Conclusions du colloque, Roland Recht

  • Visite des collections médiévales du Musée archéologique de Dijon, Christian Vernou (conservateur du Musée)

  • Visite du Puits de Moïse sur le site de l’ancienne chartreuse de Champmol, Michel Huynh

15Samedi 18 octobre

  • Excursion au château de Germolles ; visite, Mathieu Pinette (conservateur du château de Germolles)

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Notes

1 L’art à la cour de Bourgogne. Le mécénat de Philippe le Hardi et de Jean sans Peur (1364-1419), Paris, 2004.

2  R. Prochno, Die Kartause von Champmol. Grablege der burgundischen Herzöge 1364-1477, Berlin, 2002 ; Sh.-C. M. Lindquist, Patronage, Piety and Politics in the Art and Architectural Programs at the Chartreuse de Champmol in Dijon, Ph. D. 1995 (University of Evanston, Illinois) ; University Microfilms International, Ann Arbor ; à présent, Ead., Agency, Visuality and Society at the Chartreuse de Champmol, Aldershot, 2008.

3  D. Russo, « L’iconographie vétéro-testamentaire à la cour de Bourgogne » et Sh.-C. M. Lindquist, « Le sacré circonscrit : le corps du Christ à la Chartreuse de Champmol », in E. Taburet-Delahaye (dir.), La création artistique en France autour de 1400, Paris, 2006, p. 381-394 et 395-408 respectivement.

4  S. Nash, « Claus Sluter’s “Well of Moses” for the Chertreuse de Champmol reconsidered », I et II, in The Burlington Magazine, 147/1233 (décembre 2005) ; 148/1235 (juillet 2006), p. 798-809 et 456-467 respectivement.

5  Pour un tableau d’ensemble, voir M. Jannet et F. Joubert (dir.), Sculpture médiévale en Bourgogne, collection lapidaire du Musée archéologique de Dijon, Dijon, 2000, en part. V. Boucherat, « Chartreuse de Champmol, Calvaire du grand cloître », p. 169-184, n° 65-70.

6  C. Monget, La Chartreuse de Dijon, d’après les documents des archives de Bourgogne, Montreuil-sur-Mer/Tournai, 1898-1905.

7  R. Recht, Le croire et le voir. L’art des cathédrales (XIIe-XVe siècle), Paris, 1999, en part. p. 358-360 ; pour une réflexion plus générale, Id., Penser le patrimoine. Mise en scène et mise en ordre de l’art, Paris, 1998.

8  K. Morand, Claus Sluter, Artist at the Court of Burgundy, Londres, 1991, en part. p. 91-110.

9  E. Konigson, L’espace théâtral médiéval, Paris, 1975 ; et surtout, H. Rey-Flaud, Le cercle magique. Essai sur le théâtre en rond à la fin du Moyen Âge, Paris, 1973, à partir de l’étude des mystères en France au XVe siècle, en part. ses conclusions, p. 266-299.

10  Cette donnée reste fondamentale si l’on veut comprendre, un jour, la forme et le décor peint, sculpté, des grands retables dits de Champmol, et conservés au Musée des Beaux-Arts de Dijon.

11  I. Rosier-Catach, La parole efficace. Signe, rituel, sacré, Paris, 2004. Voir également R. Recht, Le croire…, op. cit., en part. chap. 5, p. 251-333.

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Pour citer cet article

Référence papier

Sophie Jugie et Daniel Russo, « Autour du « Puits de Moïse ».
Pour une nouvelle approche », Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 13 | 2009, 237-242.

Référence électronique

Sophie Jugie et Daniel Russo, « Autour du « Puits de Moïse ».
Pour une nouvelle approche », Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA [En ligne], 13 | 2009, mis en ligne le 04 septembre 2009, consulté le 27 février 2014. URL : http://cem.revues.org/11075 ; DOI : 10.4000/cem.11075

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Sophie Jugie

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