It is the cache of ${baseHref}. It is a snapshot of the page. The current page could have changed in the meantime.
Tip: To quickly find your search term on this page, press Ctrl+F or ⌘-F (Mac) and use the find bar.

Apports de la phonétique expérimentale à la didactique de la prononciation du français langue étrangère
Navigation – Plan du site
Articles

Apports de la phonétique expérimentale à la didactique de la prononciation du français langue étrangère

Étape 1 : réflexion autour de l’établissement d’un corpus
Contributions of experimental phonetics to the didactics of the pronunciation of French as a Foreign language. Stage 1: establishing a corpus
Claire Pillot-Loiseau, Angélique Amelot et Florentina Fredet
p. 75-88

Résumés

La prononciation et la prosodie d’apprenants de Français Langue Étrangère (FLE) sont étudiées au travers : 1) du choix de critères de présentation des apprenants du FLE ; 2) d’une réflexion préalable à la création d’un corpus et à la passation de son enregistrement ; 3) d’un test de faisabilité du corpus ; 4) d’un enregistrement acoustique et physiologique d’apprenants et de sujets témoins. Cette approche a permis la réadaptation du corpus, et ouvre la perspective de l’établissement d’une base de données comportant des mesures acoustiques et physiologiques. Il en découle plusieurs implications pédagogiques étudiées ultérieurement : grilles d’évaluation avant et après un cours de prononciation, exercices de prononciation appropriés.

Haut de page

Texte intégral

I. Introduction

1Notre université reçoit de plus en plus d’inscriptions pour l’obtention du Diplôme d’Université de Phonétique appliquée à la langue française. Afin de mieux s’intégrer dans le pays d’accueil, les étudiants actuels souhaitent acquérir une prononciation non marquée. En effet, il ne suffit pas de connaître le vocabulaire et la grammaire d’une langue si l’on veut atteindre un degré d’intelligibilité jugé acceptable par les natifs. De nos jours, l’oral occupe une place importante et l’apprenant étranger doit maîtriser les habitudes articulatoires et prosodiques de la langue cible s’il souhaite favoriser les échanges en situation naturelle de communication avec les natifs. Ainsi, pour l’évaluation et la didactique de la prononciation des apprenants testés, nous aurons recours, dans notre étude, à trois instruments non invasifs d’abord utilisés en phonétique expérimentale.

  • 1 Tous nos remerciements à Bertrand Lauret pour ses judicieuses remarques sur cette étude.

2C’est pourquoi il nous a paru nécessaire de consacrer la majeure partie de cet article à la première étape permettant l’acquisition de ces données : la constitution d’un corpus adapté aux capacités et aux besoins spécifiques des apprenants étrangers, et l’établissement de la nature et des conditions d’enregistrement des apprenants1.

3Dans un deuxième temps, nous pourrons construire des grilles systématiques d’analyse et d’évaluation des capacités phonétiques des apprenants des points de vue physiologique, acoustique, et perceptif, et comparer ces productions à une population témoin. À la suite de ces recueils d’enregistrements, une base de données d’apprenants étrangers et de natifs, initiée ici, sera également construite.

II. Objectifs

4Cette étude est le début d’un vaste projet d’établissement d’une base de données de sujets témoins et d’apprenants étrangers à partir d’un corpus destiné à explorer leur production, sur les versants segmental (phonèmes) et suprasegmental (mélodie, rythme, accentuation). Dans un premier temps, des enregistrements ont été effectués sur une petite population de sujets (10 locuteurs) afin :

  • de vérifier la faisabilité du corpus, et le compromis entre son efficacité expérimentale (nombre suffisamment important de phrases et de contextes phonétiques explorés) et sa possible réalisation par des apprenants ayant un niveau de français différent. Il s’agit ici d’éviter : (1) la fatigabilité par un corpus trop long ; (2) la multiplication artificielle des erreurs par l’emploi de phrases au lexique ou à la syntaxe trop complexe ou éloignée de l’expression orale quotidienne ;

  • de valider les conditions d’enregistrement et le matériel utilisé.

5Nous espérons que, par la suite, ces données permettront : (1) de fournir quelques données préliminaires comparatives entre témoins et apprenants étrangers ; (2) d’en tirer les premières conclusions permettant d’établir une grille d’évaluation de ces aspects ; (3) d’établir une méthodologie du traitement de ces données et de l’organisation de la base de données conséquentes ; (4) d’adapter, si besoin est, la direction à venir de ce projet.

III. Données sur les sujets

1. Choix des critères de présentation des sujets

6L’objectif de cette section est d’établir une grille de présentation des sujets étrangers, utile à tout enseignant de FLE, ainsi qu’un questionnaire amenant l'apprenant à se poser des questions sur son opinion quant à la/sa prononciation du français. Pour mieux connaître chaque sujet et intégrer, à terme, des informations essentielles dans la base de données, il nous a paru primordial de soigner le contenu de la présentation de chaque apprenant au moyen des critères suivants :

7a. Coordonnées, langue maternelle, nationalité, activité professionnelle

NOM, prénom

Âge

Langue maternelle

Adresse en France

Profession d’origine

Email

Nationalité

Téléphone en France

Travail en France

8b. Séjour en France

  1. Depuis quand êtes-vous en France ?

  2. Avez-vous déjà fait un séjour en France ou dans d’autres pays ? Quand ? Combien de temps ?

9c. Niveau d’études dans le pays d’origine et en France

10d. Formation en français et autres langues parlées ; conscience des difficultés

11e. Opinions subjectives sur la prononciation du français (Exprimez franchement votre opinion sur la prononciation du français).

12Nous supposons que ces critères agissent sur le classement du locuteur dans un « groupe de niveau » et sur les résultats obtenus. En particulier, une personne pratiquant le français depuis longtemps aura probablement un niveau de prononciation supérieur à celui qui le pratique depuis peu. Ce facteur peut être pondéré par d’autres éléments, comme le type et la durée de la formation en prononciation française, si la langue a été apprise en France ou dans le pays d’origine (cf. tableau 1), ou si le sujet perçoit négativement les sons du français.

2. Exemple de présentation d’apprenants étrangers

13Ces informations apparaissent dans le tableau 1 : nous y constatons que ces sujets ont un niveau très satisfaisant de compréhension orale et écrite du français.

Tableau 1. Présentation des quatre apprenants étrangers de notre étude préliminaire (principaux éléments)

Tableau 1. Présentation des quatre apprenants étrangers de notre étude préliminaire (principaux éléments)

*ILPGA : Institut de Linguistique et de Phonétique Générales et Appliquées

  • 2 Tous nos remerciements à Julien Eychenne qui nous a permis d’adapter cette plateforme à l’organisat (...)

14Ces informations seront synthétisées et adaptées en métadonnées pour la création d’une base de données. Pour son établissement, notre choix s’est porté sur l’adaptation d’une plateforme déjà existante : la plateforme « PFC » (« Phonologie du Français Contemporain »2, voir paragraphe VII).

IV. Instrumentation utilisée pour les enregistrements

15Pour chacun des 10 sujets, un enregistrement avec trois instrumentations en simultané a pu être réalisé. L’avantage de ces équipements non invasifs disponibles au Laboratoire de Phonétique et Phonologie (Vincent et al. à paraître) est qu’ils ne gênent pas les locuteurs dans l’émission de la parole naturelle, d’une part, et qu’ils captent la production de la parole à différents étages de l’appareil vocal, d’autre part. Citons les enregistrements microphoniques (niveau buccal), piézoélectrique (niveau nasal), et électroglottographique (niveau laryngé, figure 1).

Figure 1. Instrumentations utilisées pour les enregistrements

Figure 1. Instrumentations utilisées pour les enregistrements

1. Enregistrement microphonique (du niveau buccal)

16Chaque sujet était équipé d’un casque de marque Beyerdynamique supportant le micro de marque Schoeps de type cardio axial ou hypercardioïde (HS 4VXS). En effet, il est important d’enregistrer les locuteurs avec un microcasque pour que l’intensité, donc la distance entre la bouche et le micro reste constante (10 cm) durant tout l’enregistrement, contrainte nécessaire pour les tests de perception. En effet, cet enregistrement acoustique servira de base aux futures évaluations perceptives des productions des apprenants par des juges experts en FLE.

2. Enregistrement piézoélectrique (de la sortie nasale)

17L’accéléromètre piézoélectrique est un microphone de contact se présentant sous la forme de deux capteurs métalliques de 1 cm de diamètre (marque : K&K Sound), placés de chaque côté de l’arête nasale latérale : ce dispositif, non invasif, enregistre les vibrations nasales passant par la cavité nasale et permet ainsi de visualiser précisément les endroits de la chaîne de parole où existe le phénomène de nasalisation (Horii 1980 : 254).

18Ce type d’enregistrement permet de mesurer le rapport (ratio) entre l’amplitude du signal acoustique oral et celle du signal nasal. De cette façon, l’on peut détecter des indices de nasalité, afin de déterminer les différences constatées dans la production des voyelles et des consonnes nasales. Ces résultats peuvent se montrer particulièrement pertinents dans le domaine du Français Langue Étrangère quand, par exemple, une voyelle nasale est produite comme une voyelle orale par un apprenant étranger ou, au contraire, quand une voyelle orale est nasalisée au contact d’une consonne nasale.

3. Enregistrement électroglottographique (EGG) du niveau laryngé

19Méthode non invasive, l’électroglottographie permet d’enregistrer indirectement le comportement laryngé en mesurant le changement d’impédance électrique à travers la gorge durant la parole. L’électroglottographe est notamment constitué d’un générateur délivrant un courant alternatif haute fréquence et de deux électrodes appliquées sur le cou du sujet au niveau de son cartilage thyroïde. (Henrich 2001 : 87). Le signal électroglottographique permet une détection optimale de la fréquence fondamentale et du voisement des phonèmes (figure 2). Grâce à ce dispositif, il nous sera aisé, dans des études ultérieures, de visualiser d’éventuels écarts de voisement concernant les consonnes sourdes et sonores.

Figure 2. Exemples de tracés obtenus pour le syntagme « en attendant le banquet » prononcé par un sujet témoin masculin. De haut en bas : spectrogramme ; signal acoustique ; signal issu de l’accéléromètre piezoélectrique ; signal issu de l’électroglottographe

Figure 2. Exemples de tracés obtenus pour le syntagme « en attendant le banquet » prononcé par un sujet témoin masculin. De haut en bas : spectrogramme ; signal acoustique ; signal issu de l’accéléromètre piezoélectrique ; signal issu de l’électroglottographe

V. Calibration et déroulement de l’enregistrement

20Les enregistrements ont duré en moyenne une heure, installation et calibration des appareils comprises. Ils ont abouti à 15/20 minutes de parole selon le niveau de l’apprenant et le débit de parole produit. Après l’installation du dispositif, quelques productions destinées à calibrer les différents appareils étaient demandées :

211) production des premières phrases du corpus pour calibrer le niveau global d’enregistrement du microphone et ainsi éviter la saturation du signal acoustique ;

  • 3 Syllabes ou mots sans contenu sémantique.
  • 4 La présence de consonnes occlusives et l’intensité extrême de [a] permet d’éviter la saturation du (...)

222) production de : a) deux sons de type [a] et [m] tenus ; b) logatomes3 enchâssés dans une phrase cadre : « Il a dit « tatatat » trois fois. Il a dit « tititit » trois fois. Il a dit « mamamam » trois fois. Il a dit « mimimim » trois fois »4 et c) « Il a dit « i » comme dans « pile »5. La production de ces phrases permet de contrôler les niveaux d’enregistrement du signal acoustique oral (issu du microphone) en comparaison avec celui du signal acoustique nasal (issu de l’accéléromètre). Cette comparaison permet d’obtenir la mesure du ratio entre les deux signaux (Horii 1980 : 254).

VI. Corpus : composition et intérêts

23Ce corpus est conçu pour évaluer finement la plupart des aspects segmentaux et suprasegmentaux de la prononciation de locuteurs français et étrangers. Il a été réalisé en deux temps. Un premier corpus est l’adaptation d’un recueil de données phonétiques, réalisé par Vaissière dans le cadre d'un contrat avec l'Agence Francophone pour l'Enseignement Supérieur et la Recherche (AUPELF-UREF) (1998 : 3). Six sujets témoins et quatre apprenants étrangers ont été enregistrés dans la chambre sourde du Laboratoire de Phonétique et Phonologie. La moyenne d’âge des témoins – 5 femmes et un homme – est de 36,2 ans (écart-type : 7,1), tandis que celle des apprenants étrangers – deux hommes et deux femmes – est de 36,2 ans (écart-type : 14). Les apprenants étrangers (un Malien, un Allemand, une Polonaise et une Hongroise) se sont soumis aux enregistrements proposés. Les premiers apprenants ont toutefois montré une fatigabilité importante lors de l’enregistrement de ce corpus, surtout parce que certaines phrases contenaient des mots qui leur étaient inconnus et dont le sens était difficile à deviner.

24Nous avons donc entrepris de réadapter un second corpus comportant quatre tâches (1. Répétition, 2. Lecture, 3. Parole spontanée, 4. Mémorisation), conformes aux techniques habituellement employées en situation d’enseignement (Abry et al. 1994 : 4 ; Kaneman-Pougatch et al. 1991 : 4 ; Charliac et al. 2003 : 3 ; Charliac et al. 2004 : 3 ; Charliac et al. 2006 : 4 ; Fredet et al. 2009 : 11 ; Lauret 2007 : 37 ; Léon 2003 : 5 ; Mabilat et al. 2004 : 4 ; Martinie et al. 2007 : 7). À partir du premier corpus existant, nous avons élaboré un second corpus destiné à l’analyse de la prononciation du français par des locuteurs dont ce n’est pas la langue maternelle.

25Nous évitons dans la plus grande partie du protocole le recours au support écrit pour éviter d’activer les habitudes de lecture en langue maternelle et l’influence de la graphie. L’objectif est ici de recueillir des données sur les différents versants de la compétence phonétique du locuteur dans des tâches de répétition, de restitution d’extraits mémorisés, de parole spontanée (narration, dialogue), et de lecture préparée et non préparée (narration, dialogue). En effet, nous suivons l’hypothèse que la perception et la production de la parole peuvent subir divers traitements sollicitant des aires cérébrales différentes : d’un traitement auditif (proche de la perception/production d’un son musical) à un traitement linguistique (lexique, grammaire, accès au sens) et orthoépique (lecture), ces divers traitements influençant notablement la performance phonétique du locuteur. Les différentes tâches proposées aux locuteurs visent à illustrer ces divers traitements possibles (Lauret 2007 : 26).

26Pour que ce corpus soit abordable aux apprenants, nous avons éliminé d’office les multiples répétitions de chaque phrase, comme cela se fait couramment dans l’acquisition de telles bases de données, afin d’éviter la fatigue des locuteurs étrangers et d’entraîner ainsi un biais dans la constitution de ces données. Le traitement statistique pourra être satisfaisant dès lors qu’un grand nombre de locuteurs sera enregistré. Le corpus se compose des éléments suivants :

A. Voyelles en divers contextes (répétition)5

1. Il a dit « i » de pipi, de titi, de kiki, de bibi, de didi, de gigi, de fifi, de sisi, de chichi, de vivi, de zizi, de jiji, de lili, de mimi, de nini, de riri.
2. Il a dit « é » de pépé, de tété, de kéké, de bébé, de dédé, de gégé, de féfé, de sésé, de chéché, de vévé, de zézé, de jéjé, de lélé, de mémé, de néné, de réré.
3. Il a dit « è » de perper, de terter, de kerker, de berber, de derder, de gerger, de ferfer, de serser, de chercher, de de verver, de zerzer, de jerjer, de lerler, de mermer, de nerner, de rerrer.
4. Il a dit « u » de pupu, de tutu, de kuku, de bubu, de dudu, de gugu, de fufu, de susu, de chuchu, de vuvu, de zuzu, de juju, de lulu, de mumu, de nunu, de ruru.
5. Il a dit « eu » de peupeu, de teuteu, de keukeu, de beubeu, de deudeu, de geugeu, de feufeu, de seuseu, de cheucheu, de veuveu, de zeuzeu, de jeujeu, de leuleu, de meumeu, de neuneu, de reureu.
6. Il a dit « oe » de poerpoer, de toertoer, de koerkoer, de boerboer, de doerdoer, de goergoer, de foerfoer, de soersoer, de choerchoer, de voervoer, de zoerzoer, de joerjoer, de loerloer, de moermoer, de noernoer, de roerroer.
7. Il a dit « ou » de poupou, de toutou, de koukou, de boubou, de doudou, de gougou, de foufou, de sousou, de chouchou, de vouvou, de zouzou, de joujou, de loulou, de moumou, de nounou, de rourou.
8. Il a dit « o » de popo, de toto, de koko, de bobo, de dodo, de gogo, de fofo, de soso, de chocho, de vovo, de zozo, de jojo, de lolo, de momo, de nono, de roro.
9. Il a dit « o » de porpor, de tortor, de korkor, de borbor, de dordor, de gorgor, de forfor, de sorsor, de chorchor, de vorvor, de zorzor, de jorjor, de lorlor, de mormor, de nornor, de rorror.
10. Il a dit « a » de papa, de tata, de kaka, de baba, de dada, de gaga, de fafa, de sasa, de chacha, de vava, de zaza, de jaja, de lala, de mama, de nana, de rara.
11. Il a dit « in » de pinpin, de tintin, de kinkin, de binbin, de dindin, de gingin, de finfin, de sinsin, de chinchin, de vinvin, de zinzin, de jinjin, de linlin, de minmin, de ninnin, de rinrin.
12. Il a dit « on » de ponpon, de tonton, de konkon, de bonbon, de dondon, de gongon, de fonfon, de sonson, de chonchon, de vonvon, de zonzon, de jonjon, de lonlon, de monmon, de nonnon, de ronron.
13. Il a dit « an » de panpan, de tantan, de kankan, de banban, de dandan, de gangan, de fanfan, de sansan, de chanchan, de vanvan, de zanzan, de janjan, de lanlan, de manman, de nannan, de ranran.

  • 5 Les logatomes sont transcrits orthographiquement, pour une lisibilité accessible aux non phonéticie (...)

27Cette partie du corpus permet d’étudier toutes les voyelles du français en fonction de l’entourage consonantique initial. Tous les logatomes comportent les voyelles cibles dans le même schéma intonatif. Nous avons conservé les syllabes ouvertes pour les voyelles facilement prononçables dans ce contexte, et les syllabes fermées pour celles qui se prononcent habituellement dans ce contexte.

B. Consonnes en divers contextes intervocaliques (voyelles [a] et [i], répétition)

C’est apa qui l’a dit

C’est aba qui l’a dit

C’est afa qui l’a dit

C’est ava qui l’a dit

C’est ata qui l’a dit

C’est ada qui l’a dit

C’est asa qui l’a dit

C’est aza qui l’a dit

C’est aka qui l’a dit

C’est aga qui l’a dit

C’est acha qui l’a dit

C’est aja qui l’a dit

C’est ala qui l’a dit

C’est ama qui l’a dit

C’est ana qui l’a dit

C’est ara qui l’a dit

C’est agna qui l’a dit

C’est ipi qui l’a dit

C’est ibi qui l’a dit

C’est ifi qui l’a dit

C’est ivi qui l’a dit

C’est iti qui l’a dit

C’est idi qui l’a dit

C’est isi qui l’a dit

C’est izi qui l’a dit

C’est iki qui l’a dit

C’est igi qui l’a dit

C’est ichi qui l’a dit

C’est iji qui l’a dit

C’est ili qui l’a dit

C’est imi qui l’a dit

C’est ini qui l’a dit

C’est iri qui l’a dit

C’est igni qui l’a dit

28Cette section étudie la réalisation des consonnes du français en position intervocalique avec [a] et [i], les deux voyelles les plus fréquentes dans les langues du monde. Nous nous attendons donc à ce que ces voyelles soient réalisées facilement et que le locuteur puisse ainsi se concentrer sur les consonnes.

C. Texte : Le Petit Prince : deux extraits

29C1. Répétition au début de l’enregistrement. C2. Lecture non préparée, à la fin de celui-ci

C’est alors qu’apparut le renard :
- Bonjour, dit le renard.
- Bonjour, répondit poliment le petit prince, qui se retourna mais ne vit rien.
- Je suis là, dit la voix, sous le pommier…
- Qui es-tu ? dit le petit prince. Tu es bien joli…
- Je suis un renard, dit le renard.
- Viens jouer avec moi, lui proposa le petit prince. Je suis tellement triste…
- Je ne puis pas jouer avec toi, dit le renard. Je ne suis pas apprivoisé.
- Ah pardon, fit le petit prince. Mais après réflexion, il ajouta :
- Qu’est-ce que signifie « apprivoiser » ?
- Tu n’es pas d’ici, dit le renard, que cherches-tu ? »
- Je cherche les hommes, dit le petit prince. Qu’est-ce que signifie « apprivoiser » ?
- Les hommes, dit le renard, ils ont des fusils et ils chassent. C’est bien gênant ! Ils élèvent aussi des poules. C’est leur seul intérêt. Tu cherches aussi des poules ?
- Non, dit le petit prince. Je cherche des amis. Qu’est-ce que signifie « apprivoiser » ?
On ne connaît que les choses que l'on apprivoise, dit le renard. Les hommes n'ont plus le temps de rien connaître. Ils achètent des choses toutes faites chez les marchands. Mais comme il n'existe point de marchands d'amis, les hommes n'ont plus d'amis. Si tu veux un ami, apprivoise-moi !
Adieu, dit le renard. Voici mon secret. Il est très simple : on ne voit bien qu'avec le cœur. L'essentiel est invisible pour les yeux.

30Cette section étudie la production du français dans le contexte naturel d’un texte connu internationalement, Le Petit Prince, dans deux contextes de narration : dialogue et prose. Elle permet aussi l’analyse de la prosodie du locuteur.

D. Phrase cadre dans la langue maternelle, en production

31La phrase cadre « Il a dit „<voyelle>” lentement », traduite dans la langue maternelle de l’apprenant, est produite par celui-ci ; „<voyelle>” représente chaque voyelle existant dans sa langue maternelle. Contenant toutes les voyelles de celle-ci, cette phrase cadre nous aide à savoir d’où vient l’écart de l’apprenant : est-il dû au système vocalique de sa langue maternelle ? Dans un deuxième temps, nous avons le projet d’associer à cette phrase cadre des productions évaluant le système consonantique de la langue maternelle des apprenants.

E. Phrases ambiguës en lecture non préparée

Jean lève son verre

Jean porte un journal

J’emporte un journal.

Tu n’imagines pas !

La belle ferme le voile

Tu paraîtrais soucieux.

Les gares sont dessinées

Le rapace la noie.

Le rat passe la noix.

Tu parais très soucieux.

C’est bien d’accord.

Les garçons dessinaient.

J’enlève son verre.

Une tasse, deux chocolats.

Je ne pense pas.

Une tasse de chocolat.

Je viendrai demain.

La belle ferme le voile

32Cette partie évalue la prosodie dans son rôle de démarcateur de sens des phrases (montée intonative séparant les groupes dans une phrase et allongement de la dernière syllabe de chaque groupe) : celles-ci sont lues dans le désordre. Entre elles sont introduites d’autres phrases jouant le rôle de distracteurs (ex : « je ne pense pas »).

F. Une phrase sur plusieurs intonations, en répétition et en production

33« Il fait beau » question, affirmation, surprise, tristesse, joie, colère, fatigue.
Ici sont analysées les diverses modalités intonatives d’une même phrase française.

G. Parole spontanée (conversation)

34Celle-ci se traduit avec les deux modalités suivantes : 1. Raconter l’activité du week-end dernier ; 2. L’apprenant pose des questions à l’expérimentateur. Cette séquence (en moyenne deux minutes de conversation) nous donne une idée de l’expression orale spontanée du sujet.

H. Extrait de texte mémorisé (à donner à l’avance à l’apprenant)

  • 6 Paroles, 1945. ©1972 Éditions Gallimard.

35Pour toi mon amour, de Jacques Prévert6

Je suis allé au marché aux oiseaux
Et j'ai acheté des oiseaux
Pour toi
Mon amour
Je suis allé au marché aux fleurs
Et j'ai acheté des fleurs
Pour toi
Mon amour
Je suis allé au marché à la ferraille
Et j'ai acheté des chaînes
De lourdes chaînes
Pour toi
Mon amour
Et je suis allé au marché aux esclaves
Mais je ne t'ai pas trouvée
Mon amour

36Ce poème de Prévert est choisi pour sa simplicité de langue et de mémorisation en raison de son caractère répétitif.

VII. Constitution de la base de données

37L’ensemble des données a été intégré dans un module adapté de la plateforme « PFC » (« Phonologie du français contemporain ») version 2 (Durand et al. 2002 : 94 ; Durand et al. 2005 : 207 ; Durand et al. 2009). Cet outil rassemble d’anciens dispositifs dans une seule interface tout en offrant de nouvelles fonctionnalités. Il permet d'organiser les corpus, de les annoter (métadonnées), d'effectuer des requêtes, etc. Il offre par ailleurs une intégration avancée avec le logiciel d’analyse du son Praat (Boersma & Weenink 2009), permettant ainsi des va-et-vient aisés entre les données sur les locuteurs et le signal.

VIII. Conclusion

38Cette réflexion autour d’un corpus réalisable par des apprenants étrangers n’est qu’un préalable à un projet beaucoup plus vaste, celui de constituer une importante base de données de productions d’apprenants de FLE. À partir des mesures effectuées grâce à des instruments non-invasifs, nos analyses nous permettront : 1) de présenter leurs résultats dans de prochaines études (ex : écarts de voisement de certaines consonnes ; voyelle orale nasalisée au contact d’une consonne nasale) ; 2) de développer des moyens pédagogiques pertinents pour aider les apprenants à améliorer leur prononciation du français.

Haut de page

Bibliographie

Abry, D. & M.-L Chalaron. 1994. 350 exercices de phonétique. Paris : Hachette.

Boersma, P. & D. Weenink. 2009. “Praat : doing phonetics by computer (Version 5.1.05)” [en ligne] www.praat.org. (consult. 26-10-2009).

Charliac, L., A.-C. Morton, J.-T. Le Bougnec & B. Loreil. 2003. Phonétique progressive du français (niveau débutant). Paris : CLE International.

Charliac, L., A.-C. Morton, J.-T. Le Bougnec & B. Loreil. 2004. Phonétique progressive du français (niveau intermédiaire). Paris : CLE International.

Charliac, L., A.-C. Morton, J.-T. Le Bougnec & B. Loreil. 2006. Phonétique progressive du français (niveau avancé). Paris : CLE International.

Durand, J., B. Laks & C. Lyche. 2002. « La phonologie du français contemporain : usages, variétés et structure ». In Pusch, C. & W. Raible (eds.) Romanistische Korpuslinguistik-Korpora und gesprochene Sprache/Romance Corpus Linguistics - Corpora and Spoken Language. Tübingen: Gunter Narr Verlag, 93-106.

Durand, J., B. Laks & C. Lyche. 2005. « Un corpus numérisé pour la phonologie du français ». In Williams G. (ed.) La linguistique de corpus. Rennes : Presses Universitaires de Rennes, 205-217.

Fredet, F. & M. Patéli. 2009. Prononciation du français. Athènes : Anoikto Vivlio, Ed.

Henrich, N. 2001. Étude de la source glottique en voix parlée et chantée : modélisation et estimation, mesures acoustiques et électroglottographiques, perception. Thèse de doctorat d’Acoustique de l’Université Paris 6, 287 pages.

Horii, Y. 1980. “An Accelerometric approach to nasality measurement: A preliminary report”. Cleft Palate Journal 17: 254-261.

Kaneman-Pougatch, M. & E. Pedoya-Guimbretière. 1991. Plaisir des sons : enseignement des sons du français. Paris : Hatier/Didier.

Lauret, B. 2007. Enseigner la prononciation du français : questions et outils. Paris : Hachette.

Léon, M. 2003. Exercices systématiques de prononciation française. Paris : Hachette.

Mabilat, J.-J. & C. Martins. 2004. Sons et intonation. Paris : Didier –FLE.

Martinie B. & S. Wachs. 2007. Phonétique en dialogue, niveau débutant. Paris : CLE international.

Vaissière, J. 1998. Corpus élaboré dans le cadre d’un contrat sur la comparaison des langues entre l’Institut de Linguistique et de Phonétique Générales et Appliquées (ILPGA) et l'Agence Francophone pour l'Enseignement Supérieur et la Recherche (AUPELF-UREF).

Vincent, C., A. Amelot, L. Crevier-Buchman, C. Fougeron, K. Honda, G. Lo Bue, S. Maeda & J. Vaissière. À paraître. « PEP2, la plateforme d'étude physiologique de la parole du Laboratoire de Phonétique et Phonologie : Présentation et retour d'expérience », 5e colloque interdisciplinaire en instrumentation – C2i 2010, Hermès, Paris.

Haut de page

Notes

1 Tous nos remerciements à Bertrand Lauret pour ses judicieuses remarques sur cette étude.

2 Tous nos remerciements à Julien Eychenne qui nous a permis d’adapter cette plateforme à l’organisation de nos données en une base structurée.

3 Syllabes ou mots sans contenu sémantique.

4 La présence de consonnes occlusives et l’intensité extrême de [a] permet d’éviter la saturation du signal microphonique et la production de [m] celle du signal piezoélectrique.

5 Les logatomes sont transcrits orthographiquement, pour une lisibilité accessible aux non phonéticiens.

6 Paroles, 1945. ©1972 Éditions Gallimard.

Haut de page

Table des illustrations

Titre Tableau 1. Présentation des quatre apprenants étrangers de notre étude préliminaire (principaux éléments)
Légende *ILPGA : Institut de Linguistique et de Phonétique Générales et Appliquées
URL http://apliut.revues.org/docannexe/image/723/img-1.png
Fichier image/png, 51k
Titre Figure 1. Instrumentations utilisées pour les enregistrements
URL http://apliut.revues.org/docannexe/image/723/img-2.png
Fichier image/png, 25k
Titre Figure 2. Exemples de tracés obtenus pour le syntagme « en attendant le banquet » prononcé par un sujet témoin masculin. De haut en bas : spectrogramme ; signal acoustique ; signal issu de l’accéléromètre piezoélectrique ; signal issu de l’électroglottographe
URL http://apliut.revues.org/docannexe/image/723/img-3.jpg
Fichier image/jpeg, 132k
Haut de page

Pour citer cet article

Référence papier

Claire Pillot-Loiseau, Angélique Amelot et Florentina Fredet, « Apports de la phonétique expérimentale à la didactique de la prononciation du français langue étrangère », Cahiers de l’APLIUT, Vol.XXIX N° 2 | 2010, 75-88.

Référence électronique

Claire Pillot-Loiseau, Angélique Amelot et Florentina Fredet, « Apports de la phonétique expérimentale à la didactique de la prononciation du français langue étrangère », Cahiers de l’APLIUT [En ligne], Vol.XXIX N° 2 | 2010, mis en ligne le 27 mai 2011, consulté le 05 mars 2014. URL : http://apliut.revues.org/723 ; DOI : 10.4000/apliut.723

Haut de page

Auteurs

Claire Pillot-Loiseau

Claire Pillot-Loiseau, orthophoniste, est Maître de conférences à l’Institut de Linguistique et de Phonétique Générales et Appliquées (ILPGA) de l’Université Paris 3 Sorbonne Nouvelle où elle enseigne dans le Diplôme d’Université de Phonétique Appliquée à la langue française, en Master pour la didactique du FLE et en orthophonie. Elle est membre du Laboratoire de Phonétique et Phonologie UMR 7018 CNRS à l’Université Paris 3 et du Laboratoire de Phonétique et Phonologie.

claire.pillot@univ-paris3.fr

Angélique Amelot

Ingénieur d’Études à l’université Paris 3, Angélique Amelot est responsable de la gestion technique du Laboratoire de Langues de cette université et s’occupe des nombreux équipements dédiés à la didactique du Français Langue Étrangère disponibles dans cet établissement.

angelique.amelot@univ-paris3.fr

Florentina Fredet

Florentina Fredet, Maître de Conférences à l’université Paris 3, est enseignante et responsable pédagogique du Diplôme d’Université de Phonétique Appliquée à la langue française. Ses activités internationales comportent des échanges interuniversitaires et des conférences (phonétique du français contemporain et didactique du FLE).

ffredet@univ-paris3.fr Haut de page

Droits d'auteur

Tous droits réservés

Haut de page
  •  
    • Titre :
      Recherche et pratiques pédagogiques en langues de spécialité
      Cahiers de l'APLIUT
      En bref :
      La revue diffuse les résultats de recherches liées à l'enseignement et l'apprentissage des langues de spécialité, notamment en IUT
      Research papers related to teaching and learning languages for specific purposes
      Sujets :
      Langage, Linguistique, Sciences de l'éducation
    • Dir. de publication :
      Jean-Christophe Szombati
      Éditeur :
      Association des Professeurs de Langues des IUT (APLIUT)
      Support :
      Papier et électronique
      EISSN :
      2119-5242
      ISSN imprimé :
      2257-5405
    • Accès :
      Open access Freemium
    • Voir la notice dans le catalogue OpenEdition
  • DOI / Références