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La Tentation et les savoirs
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La Tentation et les savoirs

Gisèle Séginger

Résumés

Malgré son inactualité apparente, La Tentation de Saint Antoine se rattache à une série de savoirs, de recherches historiques, d’interrogations qui caractérisent son époque et définissent une configuration épistémologique. Les savoirs sont impliqués à deux niveaux : dans l’organisation de la poétique de l’œuvre, dans les représentations de l’œuvre. Flaubert utilise des savoirs historiques, anthropologiques et psychiatriques qui légitiment l’organisation du texte et les déconstruit en même temps. Il invente une nouvelle forme de grotesque – le grotesque des idées – et met en abyme un questionnement sur les savoirs qui évolue de la première Tentation à celle de 1874.

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Texte intégral

1Malgré son inactualité apparente, La Tentation de 1849 se rattache à une série de savoirs, de recherches historiques, d’interrogations qui caractérisent son époque et définissent une configuration épistémologique. Tout d’abord par le choix même du sujet : l’alexandrisme avec lequel le XIXe siècle se trouve des affinités. Ballanche (Essais de Palingénésie sociale, 1827), Émile Saisset (Essais sur la philosophie et la religion au XIXe siècle, 1845), et Jacques Matter (Histoire de l'École d'Alexandrie, comparée aux principales écoles contemporaines, 1840-1844) voient des similitudes entre l’éclectisme du XIXe siècle et l’alexandrisme où ils retrouvent un mélange de religion, de philosophie et de science. Flaubert choisit une époque qui lui permettra de poser la question du savoir. Car, en effet, non seulement La Tentation mobilise des savoirs mais elle pose aussi la question du savoir.

2Flaubert réécrit la légende de saint Antoine en ajoutant des épisodes : le défilé des Hérésies, la mort des Dieux, l’apparition de l’allégorie la Science, pour poser la question moderne du savoir et de son rapport avec les croyances. Question d’actualité en un temps où le positivisme glisse parfois vers le religieux, lorsque par exemple on espère que la science puisse être l’avenir de la religion comme on le voit dans le livre de Renan L’Avenir de la science écrit en 1848 et publié plus tard en 1890 sans remaniement et comme un bon témoignage de l’esprit de 1848. L’allégorie de la Science (qui disparaîtra ensuite de La Tentation de 1874) a justement cette prétention de devenir la religion de l’avenir.  

3L’œuvre est aussi moderne par les savoirs – plus que les sciences – qu’elle implique non plus cette fois dans la représentation même et l’intrigue mais à un autre niveau, dans l’élaboration d’une forme. On verra que les savoirs historiques du XIXe siècle ainsi que les travaux de médecine sur l’hallucination et sur les sciences naturelles sont impliqués dans l’invention d’une poétique de l’œuvre. La greffe des savoirs noue fortement l’épistémologique et l’esthétique par leur métamorphose en logique, en structuration. Ils changent de statut : ce ne sont plus des énoncés localisables en un point précis du texte mais la logique même qui articule l’ensemble des représentations et des énoncés.

  • 1  Voir Les Sources de l'épisode des dieux dans La Tentation de saint Antoine (1ère version, 1849), V (...)

4Flaubert se documente pour faire parler les Dieux et les Hérésies : la dimension érudite de l’œuvre est évidente et a bien été étudiée par Jean Seznec qui montre que la phrase flaubertienne se construit comme une mosaïque à partir de fragments hétéroclites empruntés à différents auteurs (des écrivains de l’antiquité aux historiens du XIXe siècle)1. Toutefois, ce n’est pas ce rapport du texte à l’érudition dans le détail des énoncés et des citations qui m’intéressera ici mais plutôt le rapport du texte aux savoirs qui travaillent dans l’organisation générale de l’œuvre. La poétique sert d’interface à une transmutation des savoirs à leur conversion en force de structuration, productrice d’une forme textuelle. Je m’intéresserai aussi aux modalités de la conversion des savoirs en fiction, à la condensation de savoirs différents et divergents grâce à des mots et des images dotés d’une puissance plastique et qui renvoient grâce à cela à plusieurs savoirs différents. Enfin dans un troisième temps, j’aborderai la transformation du rapport aux savoirs entre La Tentation de 1849 et celle de 1874.

La poétique de l’œuvre et la déconstruction des savoirs

  • 2  Les psychiatres s’intéressent aux phénomènes religieux pour en donner une interprétation médicale (...)

5Dans la première Tentation, l’utilisation de savoirs divers se fait au profit d’une structure d’ensemble qui refuse toute valeur aux représentations à cause de leur pluralité, et par voie de conséquences aux savoirs qui tentent de les organiser – aux savoirs historiens en particulier dont Flaubert retourne la perspective et les propositions. En effet, dans La Tentation de 1849, Flaubert met déjà au point une structure d’œuvre critique qui recourt aux savoirs pour donner forme à la fiction. L’hallucination et la succession des dieux en sont bien la preuve, ils se fondent sur des savoirs typiques du XIXe siècle : les études sur le psychisme font des mystiques des hallucinés2, l’histoire des religions tente d’expliquer la succession des croyances et de lui donner une logique.

  • 3  Les références aux scénarios indiquées entre parenthèses dans le texte renverront à ce manuscrit. (...)

6Dans le 3ème scénario de La Tentation de 1849, Flaubert intègre un défilé des dieux mais dès le scénario suivant (scénario pour la deuxième moitié de la troisième partie) il note : « la défilade des Dieux commence (à l'improviste, sans être annoncée, de manière qu'ils ne viennent pas d'une façon probante) » (f° 107, N.a.f. 23 671)3. Puis dans un autre scénario, il cherche à éviter ce danger par une présentation qui exposera les croyances sans créer de progression (contrairement aux histoires des religions) et en montrant leur similitude fondamentale : « la luxure permanente dans les religions – le climat dure la forme passe les Prêtres de la déesse de Syrie se déchiraient les bras comme maintenant les Derviches – rien ne change – éternité du soleil » (f° 105). La répétition est comme le degré zéro du classement et le degré zéro de l’interprétation, ce qui doit donc résister au désir de savoir du lecteur en le renvoyant à un fond éternel – la luxure.

  • 4  Il a lu et pris des notes sur cet ouvrage, adapté en français par Charles Bénard, probablement pou (...)
  • 5  Dans Le Génie des religions, Quinet raconte l’histoire des croyances comme une lutte de l’esprit p (...)

7Mais dans les quatre scénarios partiels du défilé (f° 101 v°, 186 v°, 171 et 173), Flaubert s’éloigne peu à peu de cette idée, et il essaie des classements, glissant vers une interprétation qui néanmoins retourne complètement les modèles d’interprétation qu’il utilise alors. Il se souvient de l’Esthétique de Hegel4, du Génie des religions de Quinet (1842) et surtout des Religions de l’Antiquité de Creuzer, traduit et remanié par Jean-Daniel Guigniault (1825-1851), ouvrage fondamental dans sa formation et dans l’histoire de l’historiographie des religions au XIXe siècle. Son défilé des dieux morts partira de l'Inde, comme chez Creuzer, et passant par la Perse, l'Égypte et la Grèce (il rejoint là l’ordre de Hegel), il s’achève avec le judéo-christianisme. Flaubert adopte un ordre qui renvoie bien aux histoires des religions de son temps mais il n’emprunte pas la signification rationnelle dont il est porteur. Il la déconstruit au contraire par des comparaisons grotesques qui discréditent Jéhovah, assimilé à Bélial (au f° 101 v°), et placé après Crépitus (f° 186 v°) ; par l’intrusion de l’allégorie de la Mort dans le défilé, et dans le dernier scénario partiel son fouet rythme les disparitions (f° 173). La succession chronologique ne crée pas une logique alors que le temps est un principe de rationalité pour les historiens des religions – aussi bien pour Creuzer que pour Quinet5 –, dans La Tentation il a une puissance de dégradation et ne révèle que le néant.

8La Tentation déconstruit deux savoirs importants. Tout d’abord un savoir anthropologique du religieux qui avait permis une sorte de révolution copernicienne inversée en plaçant l’homme au centre du phénomène religieux et en légitimant ainsi les religions tout en les privant d’une essence extérieure par rapport au sentiment religieux enraciné dans les subjectivités. La réflexion de Benjamin Constant (dans De la religion) représente bien cette révolution de pensée – qui rend possible épistémologiquement une œuvre comme La Tentation puisqu’elle fait de la subjectivité le foyer d’un débat sur le religieux :

  • 6  De la religion considérée dans sa source, ses formes et ses développements (1824-1831), Lausanne, (...)

L’on n’a jusqu’ici envisagé que l’extérieur de la religion. L’histoire du sentiment intérieur reste en entier à concevoir et à faire. Les dogmes, les croyances, les pratiques, les cérémonies, sont des formes que prend le sentiment intérieur et qu’il brise ensuite. […] L’on a décrit les dehors du labyrinthe. […] Tous cherchaient l’origine de la religion dans des circonstances étrangères à l’homme, les dévots comme les philosophes6.

  • 7  Introduction à sa traduction des Idées sur la philosophie de l'histoire de l'humanité de Herder, P (...)
  • 8  Ibid.
  • 9  Introduction de Quinet pour sa traduction des Idées sur la philosophie de l'histoire de l'humanité (...)

9Ce premier savoir rend possible un autre savoir du temps, deuxième savoir que déconstruit La Tentation. Si dans l’étude des croyances le véritable sujet c’est l’homme, alors il est possible de faire une histoire des croyances et la mort des religions devient interprétable comme une désymbolisation. Quinet l’a bien théorisée après Hegel et en même temps que Michelet. L’histoire pour Quinet est « le spectacle de la liberté, la protestation du genre humain contre le monde qui l’enchaîne, le triomphe de l’infini sur le fini, l’affranchissement de l’esprit, le règne de l’âme»7. La succession des religions s’explique : l’homme change d’idoles, de formes, et échappe à ses propres lois parce que « captif dans les bornes du monde, l’infini s’agite pour en sortir »8. La dialectique du fini et l’infini fait l’histoire des religions et lui donne sens. C’est un désir d’infini jamais satisfait totalement par une religion – qu’il finit toujours par briser – qui explique la succession. Grâce au temps les symboles se brisent, libérant « la loi qui les conserve intacts et qui répand en eux la force, la sagesse, l'ordre et l'harmonie »9.

  • 10  Essais de palingénésie sociale, I, Impr. de J. Didot aîné, 1827, p. 166.

10Dans la préface pour son adaptation du livre de Creuzer, Jean-Daniel Guigniault explique aussi la succession des religions par une libération progressive de l'idée qui donne sens à leur histoire. Même dans une perspective religieuse, Ballanche admet que Dieu parle dans le temps et parle la langue de l’homme si bien que l’esprit contenu dans la lettre se développe et alors « la lettre est abolie »10. C’est donc un certain savoir du temps et de l’homme – commun à des pensées différentes – qui fonde la possibilité d’une histoire des religions, et qui fait échapper les religions à la critique rationaliste du XVIIIe siècle qui les congédiaient définitivement – je pense à la position de Condorcet dans son Esquisse d’un tableau historique des progrès de l’esprit humain – comme des aberrations de l’esprit humain. Le temps et la mort font la valeur des religions.

  • 11  La Tentation de 1849, Seuil, coll. « L’Intégrale », p. 456.
  • 12  Ibid., p. 470.

11Au contraire, dans La Tentation, c'est parce qu'elles sont prises dans le temps et éphémères que le rapport des religions avec un absolu ou un infini paraît douteux. La Tentation ne montre d’ailleurs que leur mort et escamote le temps de l’adhésion. « Qu'est-ce que tout cela veut dire ? », se demande alors Antoine11. Après le défilé des Dieux la Logique suggère une réponse : « puisqu'ils sont passés tous, le tien… »12. La Tentation est un Crépuscule des Dieux. L’œuvre de Flaubert opère donc elle aussi une désymbolisation mais par le vide et elle retourne ce modèle interprétatif qui dans l’historiographie de l’époque et la philosophie de l’histoire est lié à la fois à un savoir anthropologique et à un savoir du temps.

12Dans La Tentation de 1849, les représentations ne semblent être que des remous illusoires du néant car le temps est non un mouvement qui anime de l’intérieur la succession et l’organise mais une force extérieure, un principe négatif et mystérieux dont la Mort et le Diable sont les deux figures. Flaubert donne une version grotesque de l’histoire des religions : ce sont les coups de fouet qui rythment la succession des dieux sans créer d’articulation logique.

13Outre un refus des pensées dialectiques du temps, ce que nous révèle aussi l’organisation de ce défilé, c’est une méfiance à l’égard du narratif. Flaubert juxtapose les Dieux comme pour mettre fin à l’emprise du récit. Par la fragmentation et la désarticulation de l’histoire dans une suite de tableaux sans totalisation possible il dénoue le lien du discursif et du narratif. Tout récit vaut pour une explication (Paul Ricœur a bien théorisé ce rapport dans Temps et récit). L’histoire du XIXe siècle par sa capacité globalisante et sa logique syntagmatique qui confond le chronologique et le logique ne confirme que trop la collusion du narratif et du discours, de la fiction et du savoir. L’histoire des religions au XIXe siècle était fortement empreinte de narrativité. Hegel, Michelet, ou Quinet dramatisent l’histoire des religions et l’histoire tout entière : ils font le récit d’une lutte de l’esprit, ou de l’homme pour la liberté. Le narratif est impliqué dans les catégories discursives qu’utilise l’histoire : dans la dialectique et la désymbolisation. Le conceptuel recèle une part de fiction et l’Histoire est une histoire au sens narratif du terme qui fait de l’infini, ou de l’Humanité en devenir des héros combattants. Or, c’est un savoir du temps (et du même coup une narrativité), impliqué dans ces conceptions dialectiques, que La Tentation déconstruit par le défilé et la fragmentation de l’histoire des dieux en tableaux successifs rythmés par le fouet du Diable. Dans La Tentation de 1849 aucune rationalité ne se construit dans l’entre-deux des religions et la destruction des symboles ne libère pas le dynamisme de l’histoire. Le rythme s’oppose à la continuité temporelle imaginée par les historiens et les philosophes de la dialectique qui réussissent même à faire du temps négatif de la mort un moment nécessaire.  

  • 13  Les Métaphores de l’organisme, Vrin, 1971.

14Si La Tentation déconstruit doublement le rationnel et le narratif, quel ordre invente-t-elle ? et est-il tout à fait délié, indépendant de tout savoir ? L’unité de la succession des religions tient à son rythme binaire: apparition et disparition, vie et mort. La part du narratif dans cette construction est réduite au minimum et le savoir qui est impliqué renvoie à un temps naturel. Cependant aucune logique naturaliste commune ne se dégage de l’œuvre. Son défilé des dieux n’atteint pas cette cohérence organique que Judith Schlanger a mise en évidence dans bien des pensées (politiques, historiques) au XIXe siècle13 et que l’on peut observer par exemple chez Quinet lorsqu’il écrit :

  • 14  « De la nature et de l'histoire dans leurs rapports avec les traditions religieuses et épiques », (...)

Le mythe religieux [...] vit, il respire, il s'accroît à la manière des êtres organisés. Immobile et recueilli au fond de l'Inde, comme le règne végétal dont il emprunte les symboles, il se purifie au feu sacré des nations Zends, puis s'alliant à la vie organique, il rampe avec le serpent des peuples sémitiques, s'enfuit avec la gazelle des Araméens, règne au désert avec les lions de Persépolis ; de là essayant par degré un type supérieur, il unit l'épervier d'Héliopolis, le dragon de Chio à une première ébauche de la figure humaine. Puis enfin affranchi de ces grossiers liens, et se créant à lui-même un type idéal d'humanité, il resplendit dans la ceinture de Vénus Aphrodite, ou respire la victoire sur les lèvres d'Apollon14.

15Alors que le temps organique est souvent un modèle de rationalité au XIXe siècle La Tentation met en scène un temps irrationnel, discontinu et le rythme n’est pas articulatoire mais disjonctif.

16Dans l’épisode des Animaux, Flaubert donne une représentation parodique de cette continuité caractéristique des savoirs du XIXe siècle, qui, aussi bien dans le domaine de l’histoire que dans celui des sciences naturelles, s’efforcent de trouver à toute force des transitions, des articulations :

  • 15  La Tentation, op. cit., p. 442.

Tassés, pressés, étouffant par leur nombre, se multipliant à leur contact, ils grimpent les uns sur les autres. Et cela monte en pyramide faisant un tas complexe de corps divers chacun s'agite de son mouvement propre tandis que l'ensemble remue, oscille, bruit et reluit à travers une atmosphère que raye la grêle, la neige, la pluie, la foudre, où passent des tourbillons de sable, des trombes de vent, des nuages de fumée et qu'éclairent à la fois des lueurs de lune, des rayons de soleil, des crépuscules verdâtres15.

  • 16  Voir en particulier les lettres à E. Chevalier du 23 février 1847 et à Ernest Feydeau de la fin du (...)

17La chaîne des êtres prend la forme d’une pyramide, figure ambiguë chez Flaubert puisqu'elle désigne aussi bien la composition parfaite de l’œuvre d'art que la bêtise16, la plénitude ou le vide. De plus cette pyramide en mouvement semble menacée par des tourbillons cosmiques.

18Néanmoins le déchaînement de cette force qui résorbe la vision, l’explosion d’une énergie, par delà le bien et le mal, fascinent Antoine et lui font oublier et le Diable et Dieu. Antoine a envie de rugir et de voler comme les animaux, de devenir matière pour « savoir ce qu'elle pense », mais la vision instable contredit ce désir par ses métamorphoses incessantes. Cependant, contrairement à la tradition hagiographique, et aux autres épisodes de l’œuvre, Antoine cède pour une fois au plaisir de la vision. Moins « probant » que le défilé des dieux, l’épisode des Animaux, au cœur de la Tentation, donne une autre vision du temps (une dépense, une débauche de formes fascinantes sans raison, gratuite) et cet épisode ouvre donc dans cette œuvre (qui conclut pourtant à la fin sur l’existence sombre du néant) une échappée positive. Positive non par un savoir qu’elle apporterait mais par ses qualités plastiques. L’épisode de Animaux met en scène une matière éminemment plastique, éblouissante par ses métamorphoses, une beauté fondée sur la virtuosité de la matière en quelque sorte, si bien que l’on peut émettre l’hypothèse que cette matière serait une métaphore de la force esthétique, d’un art libéré de l’ordre du savoir et qui ferait se rejoindre le cognitif et l’esthétique dans une parfaite adéquation de la matière et de la pensée, parce que cette pensée ne serait que le  dynamisme interne à la production même des formes.

L’invention d’un grotesque des idées

  • 17  Gustave Flaubert, Gallimard,1935, p. 185.
  • 18  Gustave Flaubert, l’homme et l’œuvre, Paris, Desclée de Brouwer, p. XXVII.

19La fascination d’Antoine devant la force qui anime la nature a contribué à répandre l’idée selon laquelle Flaubert aurait fait une œuvre spinoziste (selon Albert Thibaudet le Diable y ferait un « vrai cours de spinozisme »17 et René Dumesnil perçoit dans l’ensemble de La Tentation un « substratum spinoziste »18). Antoine rêve de s’oublier lui-même pour se confondre avec la pensée immanente dans la nature, avec le dynamisme de la matière, le Diable, pendant le vol dans l’espace plaide pour l’unité de l’infini. Y aurait-il donc une vérité philosophique au singulier à opposer à la pluralité des savoirs et des croyances ? Sûrement pas.

  • 19  Plusieurs réfutations ont attaqué l’athéisme de Spinoza : celle de François Lamy (1696), celle de (...)
  • 20  Dans un bilan sur le spinozisme en France du XVIIe siècle au XIXe siècle, Paul Janet, signalera, à (...)
  • 21  Lettre à Jacobi du 5 mai 1786.

20Remarquons tout d’abord, que ce n’est pas tant la philosophie de Spinoza qui trouve une place dans l’œuvre qu’une doxa spinoziste bien datée. Alors qu’au XVIIe et au XVIIIe siècles, Spinoza a souvent été considéré comme un philosophe athée19, grâce à l’influence allemande, à Goethe en particulier, grâce aussi à Victor Cousin20 ; il fait figure à l’époque romantique de grand penseur mystique et panthéiste. Selon Goethe, Spinoza « cherche le divin in herbis et lapidus »21. Or cette lecture n’est pas moins inexacte que celle de l’époque classique. Goethe ne fait pas de différence entre l’existence absolue et les existences singulières. Il interprète Spinoza dans une perspective naturaliste plus proche du panthéisme stoïcien pour lequel toutes choses dans la nature sont animées et divines. En 1838, Victor Cousin écrit à propos de l’Éthique :

  • 22  Fragments philosophiques, 3e édition, Ladrange, 1838, II, p. 164.

– « Ce livre […] est au fond un hymne mystique22 ».

  • 23  Ibid., p. 163.

– « Spinoza a tellement le sentiment de Dieu qu’il en perd le sentiment de l’homme »23.

21Flaubert écrira lui-même plus tard (dans une lettre à Mme Roger des Genettes en  mars 1879) : « cet athée, a été, selon moi, le plus religieux des hommes, puisqu’il n’admettait que Dieu ».

  • 24  Ibid., p. 165.

22Victor Cousin critique une pensée de l’unité qui donne une supériorité écrasante à l’infini : le Dieu de Spinoza ne produit le fini « que pour le détruire ». Il efface trop la personnalité de l’homme : il « n’y a pour lui, ajoute-t-il, d’être véritable que l’être éternel »24. Le Diable le suggère à Antoine dans La Tentation de 1849, mais loin d’être la philosophie de l’œuvre ce pseudo-spinozisme est donné comme une tentation.

  • 25 Manuel de philosophie à l'usage des élèves qui suivent les cours de l'Université, Paris, Maire-Nyon (...)

23Auguste Mallet (professeur de Flaubert et disciple de Cousin) est aussi un bon représentant de cette réinterprétation de Spinoza lorsqu’il écrit : « La philosophie de Spinoza est un panthéisme spiritualiste. […] L’omission de l’idée de cause conduit Spinoza à l’abolition de la liberté humaine et à l’identification de tout ce qui existe, corps et âmes, avec la substance divine. Il n’y a plus alors plusieurs substances, mais une seule, éternelle, immense, infinie, étendue et pensante, matière et esprit tout à la fois, et cette substance c’est Dieu »25. Cette confusion – qu’on ne saurait attribuer à Spinoza – entre la substance et ses modes (pensée et étendue), le glissement de l’étendue à la matière, le mélange d’une terminologie spinoziste et d’un vocabulaire chrétien (le corps et l’âme), tout cela se retrouve dans les propos du Diable de 1849. Et l’identification à tout ce qui existe est le rêve d’Antoine à la fin de l’épisode des Animaux, où la matière ressemble de fait à la « matière » du Spinoza panthéiste d’Auguste Mallet mais rencontre aussi probablement une autre pensée encore avec laquelle Flaubert la condense : la pensée matérialiste du XVIIIe siècle, telle qu’on la trouve chez Sade, dont on sait que Flaubert était un lecteur.

24Cet exemple montre l’implication d’un simple mot comme le mot « matière » dans l’histoire de la pensée, et comment l’œuvre fictionnelle tire parti de ce halo qui entoure le mot et le fait rayonner dans l’histoire de la pensée vers des savoirs différents et divergents même. C’est là, ce qui fait la spécificité du mot littéraire, sa valeur poétique et un rapport au cognitif qui n’est pas de l’ordre du savoir même lorsque les savoirs sont en jeu : ce rapport est davantage celui d’une rêverie sur les savoirs qui sait faire briller les potentialités poétiques voire fictionnelles. Dès La Tentation de 1849, Flaubert élabore des convecteurs épistémologiques qui assurent d’une part la transformation des savoirs en vision et d’autre part la condensation de savoirs différents.

25Flaubert retient de Spinoza l’omniprésence de Dieu, mais, n’étant pas croyant, il la réinterprète en un sens naturaliste et matérialiste. De l’unité spinoziste de la Substance il glisse donc vers une conception matérialiste du monde. Tandis que Spinoza insiste sur la tendance à persévérer dans l’être qui vient de Dieu, Flaubert pense la transformation des êtres.

  • 26  La Tentation, op. cit., p. 444.

26On est donc loin de Spinoza pour qui le but suprême est la connaissance de Dieu qui permet à l’homme de développer pleinement sa force rationnelle. Flaubert, lui, se garde bien de chercher la Cause, et, dans La Tentation, la Science qui en a le désir est à la fois du côté des tentateurs et des victimes qui échouent. Il met aussi en scène l’échec de cette quête dans le vol sur les cornes d’un Tentateur philosophe. Le Diable débute bien par quelques arguments spinozistes : comme l’auteur de l’Éthique qui explique l’unité de la Substance, le Diable démontre qu’il n’y a pas deux infinis et que Dieu est donc présent partout. Il « existe en vertu de lui-même », c’est-à-dire qu’il agit éternellement selon les mêmes lois et en ce sens « n’est pas libre »26. Les faits s’enchaînent selon un déterminisme qu’on ne peut arrêter. Tout cela est bien conforme à l’enseignement de Spinoza auquel il emprunte aussi un vocabulaire : « substance », « modes », « attributs ». Mais il en vient finalement à ne plus distinguer leur différence pour insister sur une unité qui se transforme en confusion : tout est dans tout, Antoine est en Dieu, Dieu est sa pensée. Enfin, il mêle différentes conceptions : il fait un montage de philosophies et convoque pêle-mêle Leibniz, Plotin, le stoïcisme, le bouddhisme, Kant, Hegel pour conduire Antoine d’une pensée de l’infini à une pensée du néant. Si la substance est une, Antoine est Dieu, il est infini et les choses sont donc en lui, dans sa pensée. Survient alors le doute terrible : peut-être ne sont-elles que des illusions de sa pensée. D’un coup le Diable ruine tout effort de connaissance et son regard se met à tourbillonner pour engloutir Antoine. À l’inverse de Spinoza qui édifie une œuvre rationaliste – dans sa forme même – Flaubert montre plutôt, dans l’épisode du vol dans l’espace, le grotesque de la pensée philosophique, qui s’embrouille lorsqu’Antoine se prend pour « une partie de Dieu », et qui s’anéantit lorsque le Diable la prive de tout objet.

27La Tentation de 1849 est une œuvre anti-dogmatique (bien que le Diable nihiliste semble avoir le dernier mot). Flaubert sait déjà, comme dans les œuvres suivantes, faire un usage fictionnel des savoirs et des discours. Il invente une organisation fictionnelle qui les retourne, il fragmente les argumentations, les dispersant dans les énoncés de locuteurs différents. Dès 1849, la fiction acquiert une fonction critique et se décale par rapport aux savoirs mêmes qui l’informent. Flaubert invente un grotesque des idées qui tente d’en déjouer la volonté d’affirmation.

28Mais, d’une part, le dénouement nihiliste et fortement conclusif semble démentir cette organisation, en donnant à l’œuvre au dernier moment le tour de vis d’un sens massivement asséné. Et, d’autre part, le personnage, quant à lui, est victime de l’illusion qu’il peut exister quelque part ailleurs que dans la représentation un Absolu dont il faut affirmer la vérité.

La mise en abyme d’un questionnement sur les savoirs

29Donnant un tour de plus, La Tentation de 1874 fera de l’ermite halluciné un esprit critique. En 1874, la vision des Hérésies et des Dieux est moins négative : Hilarion les commente, fait un cours de mythologie comparée. L’ermite ne s’interroge d’ailleurs plus sur l’existence de Dieu (ou du Néant) mais sur les formes religieuses et l’adhésion que suscitent les représentations :

Pour que la matière ait tant de pouvoir, il faut qu'elle contienne un esprit. L'âme des dieux est attachée à ses images.

  • 27  La Tentation, édition établie par Claudine Gothot-Mersch, Gallimard, Folio, p. 161.

Ceux qui ont la beauté des apparences peuvent séduire. Mais les autres... qui sont abjects ou terribles, comment y croire ?27

30En 1849, Antoine exige la vérité, en 1874, il réfléchit sur le pouvoir des représentations en tant que représentations mêmes. En 1849, la pluralité des religions est la preuve de leur illusion, en 1874, elle sera la preuve de l’inépuisable plasticité du sentiment religieux, et la puissance dynamique limitée et contenue, ou même retenue dans l’épisode des Animaux de 1849, s’étend à l’ensemble de l’œuvre et suscite le commentaire des personnages Hilarion et Antoine.

31Dans les deux Tentations, Flaubert intègre, en abyme, une figuration de la relation au savoir différente.

  • 28  La Tentation de 1849, op. cit., p. 423.

32Dans La Tentation de 1849, il introduit dans le second scénario d’ensemble parmi les grandes Visions, en compagnie de la Courtisane et de la Reine de Saba (f° 154), une allégorie de la Science qu’il déplace ensuite parmi les Péchés afin de la confronter à la Foi (f° 211). Sa représentation se transforme alors de scénario en scénario, d’abord opposée à la Foi (f° 212 v°), elle finit par se rapprocher curieusement des Vertus. Elle se dispute encore avec la Charité mais par jalousie (au f° 209 v°) car elle veut une position supérieure dans l'échelle de la sainteté, puisqu’elle s’estime « plus large, plus indulgente ». Science moderne, analytique et désintéressée au début du travail (lorsque, dans le troisième grand scénario, Flaubert l’opposait au Sphinx, l’incarnation de la magie c’est-à-dire de la science antique), l'Allégorie évolue : elle cherche finalement la Foi, note Flaubert dans un scénario, et ne l’a pas trouvé. Elle reproche à son ennemie ses certitudes et pourtant elle en voudrait aussi : « Ah, la Cause ! La cause, tu l'adores, moi je la cherche »28. Dans le texte de 1849, finalement, le désir de savoir de la Science recèle une volonté de pouvoir qui fait de la connaissance une entreprise babélique : elle veut remonter les causes comme les marches d’un escalier et « embrasser l’idée » pour remettre en mouvement la synthèse et « faire des mondes », bref usurper un pouvoir divin. Pour cette Science là, il ne saurait y avoir des savoirs mais seulement une connaissance de la vérité (l’idée), conçue comme origine. Les termes qui renvoient au mythe de Babel disent assez la part d’imaginaire qui hante cette conception, et explique ainsi l’échec de ce personnage qui dans La Tentation de 1849 est aussi bien tentateur que tentée elle-même : il y a une tentation de l’allégorie de la Science par la Connaissance, tentation récurrente dans Bouvard et Pécuchet qui transforme les savoirs en croyances, travers qui rapproche déjà la Science de la Foi dans La Tentation de 1849.

33Dans La Tentation de 1874, Flaubert mettra en scène une toute autre figure de la Science sous les traits d’Hilarion, le disciple sceptique et questionneur qui correspond davantage à la figure moderne, la science analytique, que Flaubert avait d’abord imaginée dans le troisième grand scénario de La Tentation de 1849. L’allégorie de 1849 aura, quant à elle, une descendance en Bouvard et Pécuchet, qui lisent les livres pour ensuite tenter de modifier le cours des choses ou transformer la nature.

34Bien que de manière différente, de La Tentation à Bouvard et Pécuchet, Flaubert recourt aux savoirs tout en faisant d’une interrogation sur le rapport du savoir et de l’imaginaire (ou de la fiction) le sujet même du texte. De La Tentation de 1849 à La Tentation de 1874, Flaubert généralise son entreprise puisque le savoir biologique, se trouve intégré in extremis au tableau des croyances, avec la vision ultime de la naissance de la vie sous la forme d’un petit être, sorte de tête d’épingle munie de cils (écrit Flaubert). De manière ambiguë elle prend la forme en miniature de la vision religieuse. La tête du Christ au milieu des rayons d’un soleil, qui est lui-même une image ambiguë : à la fois image traditionnelle de Dieu, image platonicienne d’une vérité philosophique, ou vérité naturaliste désymbolisée dans les interprétations matérialistes des religions – comme celle de Charles Dupuis dans De l’origine de tous les cultes qui voit dans les dieux principaux des religions un culte solaire.

  • 29  J’ai développé ce point dans mon livre Naissance et métamorphoses d’un écrivain, Flaubert et Les T (...)

35Ce dénouement condense donc le religieux et le scientifique, mais aussi le symbole et sa désymbolisation, grâce à une image strictement bipolaire, et irréductiblement bipolaire (anti-dialectique). De même la structure de l’œuvre est irréductiblement ambiguë : l’hallucination prend la forme d’une éducation29. Antoine s’interroge sous la direction d’Hilarion, appelle certaines visions pour faire progresser sa réflexion, mais touche au but au plus fort du délire et la connaissance se métamorphose alors en mystique de la vie.

36Cette structuration de l’œuvre qui confond délire et savoir fait de la fiction un processus de dé-lecture qui déconstruit ce que les savoirs lient et qui opère par le retournement critique une archéologie bouffonne de ces savoirs. Une seule certitude demeure et de taille – car elle fonde la possibilité de l’art : dans La Tentation de 1874, Antoine veut traverser les formes apparentes pour atteindre au-delà de la représentation la vérité de l’être, le sens au-delà des visions. Mais la vision finale par sa plasticité contredit cet espoir. Flaubert donne à la vérité scientifique – le globule muni de cils – et au symbole religieux – le soleil muni de rayons – la forme de l’œil d’Antoine qui les regarde comme pour suggérer avant Bouvard et Pécuchet que la science comme la religion ne sont que des manières de voir.

  • 30  Voir sur ce point mon article « Fiction et transgression épistémologique : le mythe de l'origine d (...)

37Le dénouement de La Tentation de 1874 indique peut-être une autre voie, qui serait celle d’une archéologie des savoirs, une réflexion sur les regards. Le dénouement de La Tentation de 1874 fait converger des regards divergents comme dans un miroir concentrique, les ressaisit et les rassemble en une vision esthétique unifiée qui procède par un feuilletage des savoirs. L’aboutissement de l’épisode des Animaux, des plantes et de minéraux à la naissance de la vie comme à une origine renvoie à une pluralité de savoirs scientifiques (transformisme, biologie, théorie cellulaire, génération spontanée) inconciliables sur le plan des théories mais que la fiction fusionne30 en inventant un mythe de l’origine qui a des résonances multiples dans l’histoire religieuse comme mythe de la genèse, dans l’histoire scientifique comme mythe de la découverte, et dans l’histoire de l’écrivain comme mythe de l’écriture.

38La fiction absorbe les savoirs en neutralisant leur finalité informative mais en libérant leur imaginaire pour stimuler ses potentialités fictionnelles.

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Notes

1  Voir Les Sources de l'épisode des dieux dans La Tentation de saint Antoine (1ère version, 1849), Vrin, 1940 ; « Flaubert historien des hérésies dans La Tentation », The Romanic Review, Columbia University Press, oct. et déc. 1945.

2  Les psychiatres s’intéressent aux phénomènes religieux pour en donner une interprétation médicale (c’est le cas du docteur Lelut, interprétant médicalement les visions de Pascal). De même, l’historien des religions, Alfred Maury, qui a contribué à l’adaptation française des Religions de l’Antiquité de Creuzer, publie par ailleurs une série d’études sur les hallucinations religieuses (Les Mystiques extatiques et les stigmatisés, Extrait des Annales médico-psychologiques, Impr. de L. Martinet, sans date ; De l'Hallucination envisagée au point de vue philosophique et historique, Impr. de Bourgogne et Martinet,1845). Alfred Maury entre en contact avec Flaubert à l’époque de La Tentation, grâce à un ami commun, historien des religions aussi, Alfred Baudry.

3  Les références aux scénarios indiquées entre parenthèses dans le texte renverront à ce manuscrit.

4  Il a lu et pris des notes sur cet ouvrage, adapté en français par Charles Bénard, probablement pour la première fois en 1844. Voir « Notes inédites de Flaubert sur L’Esthétique de Hegel », Dix ans de critique, textes réunis par G. Séginger, Gustave Flaubert 5, 2005, p. 247-330.

5  Dans Le Génie des religions, Quinet raconte l’histoire des croyances comme une lutte de l’esprit pour se libérer de la matière.

6  De la religion considérée dans sa source, ses formes et ses développements (1824-1831), Lausanne, Bibliothèque romantique, I, p. 37.

7  Introduction à sa traduction des Idées sur la philosophie de l'histoire de l'humanité de Herder, P. G. Levrault, 1827, I, p. 32.

8  Ibid.

9  Introduction de Quinet pour sa traduction des Idées sur la philosophie de l'histoire de l'humanité de Herder, op. cit., I, p. 16.

10  Essais de palingénésie sociale, I, Impr. de J. Didot aîné, 1827, p. 166.

11  La Tentation de 1849, Seuil, coll. « L’Intégrale », p. 456.

12  Ibid., p. 470.

13  Les Métaphores de l’organisme, Vrin, 1971.

14  « De la nature et de l'histoire dans leurs rapports avec les traditions religieuses et épiques », De la Grèce et de ses rapports avec l'antiquité, Paris, F. G. Levrault, 1830, p. 410.

15  La Tentation, op. cit., p. 442.

16  Voir en particulier les lettres à E. Chevalier du 23 février 1847 et à Ernest Feydeau de la fin du mois de novembre 1857.

17  Gustave Flaubert, Gallimard,1935, p. 185.

18  Gustave Flaubert, l’homme et l’œuvre, Paris, Desclée de Brouwer, p. XXVII.

19  Plusieurs réfutations ont attaqué l’athéisme de Spinoza : celle de François Lamy (1696), celle de Bayle, dans son dictionnaire (1697) et celle de Fénelon, dans son Traité de l’existence de Dieu (1718). Au XVIIIe siècle l’article de Bayle est souvent la source principale des attaques, comme celle de Voltaire qui reproche à Spinoza « de faire Dieu astre et citrouille, pensée et fumier, battant et battu » (Le Philosophe ignorant, XXIV).

20  Dans un bilan sur le spinozisme en France du XVIIe siècle au XIXe siècle, Paul Janet, signalera, à la fin du siècle, l’importance de Victor Cousin qui a restitué à Spinoza sa place dans l’histoire de la philosophie et bien montré que le panthéisme ne doit pas se confondre avec l’athéisme (Revue philosophique de la France et de l’étranger, janvier-juin 1882, p. 110-132). Mais Victor Cousin reproche néanmoins à cette philosophie de mettre en cause la liberté et la personnalité de l’homme.

21  Lettre à Jacobi du 5 mai 1786.

22  Fragments philosophiques, 3e édition, Ladrange, 1838, II, p. 164.

23  Ibid., p. 163.

24  Ibid., p. 165.

25 Manuel de philosophie à l'usage des élèves qui suivent les cours de l'Université, Paris, Maire-Nyon, libraire, 1835, p. 187.

26  La Tentation, op. cit., p. 444.

27  La Tentation, édition établie par Claudine Gothot-Mersch, Gallimard, Folio, p. 161.

28  La Tentation de 1849, op. cit., p. 423.

29  J’ai développé ce point dans mon livre Naissance et métamorphoses d’un écrivain, Flaubert et Les Tentations de saint Antoine, Champion, 1997.

30  Voir sur ce point mon article « Fiction et transgression épistémologique : le mythe de l'origine dans La Tentation de saint Antoine de Flaubert », The Romanic Review, janvier 1997.

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Pour citer cet article

Référence électronique

Gisèle Séginger, « La Tentation et les savoirs », Flaubert [En ligne], 1 | 2009, mis en ligne le 19 janvier 2009, consulté le 28 février 2014. URL : http://flaubert.revues.org/389

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Auteur

Gisèle Séginger

Université Paris Est – LISAA/EA 4120

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    • Titre :
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      Revue critique et génétique
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