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Le concept d’ethos.
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La forge conceptuelle

Le concept d’ethos.

De ses usages classiques à un usage renouvelé
Bernard Fusulier
p. 97-109

Résumé

Dans cet article, l’auteur traite de la signification et de l’usage du concept d’ethos. Dans la sociologie classique, ce dernier a été utilisé pour comprendre et qualifier la rationalité socialement et éthiquement encastrée des conduites sociales. Exprimant l’intériorisation d’un principe organisateur de pratiques, dessinant une matrice globale des comportements, il est porteur d’une vision qui paraît datée à l’heure du “brouillage des classes sociales”, de la “modernité liquide” et de “l’homme pluriel”. Néanmoins, si l’on reconnaît l’existence d’un univers social non entièrement liquéfié, c’est-à-dire où continuent à exister des milieux sociaux sédimentés qui imprègnent avec plus ou moins de profondeur le système de personnalité de celui qui s’y insère durablement, l’ethos reste un concept heuristique pour saisir et interpréter les récurrences de comportements qui peuvent s’y observer. Permettant de comprendre ce que les espaces d’insertion “font aux individus” ainsi que la façon dont les principes organisateurs de pratiques entrent en transaction (en consonance, en dissonance ou en concurrence), il garde toute sa pertinence dans la boîte à outils théoriques du sociologue et de l’anthropologue d’aujourd’hui.

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Texte intégral

L’auteur remercie Guy Bajoit, Didier Demazière, Nicolas Marquis et Thibauld Moulaert pour leur lecture et leurs commentaires d’une version antérieure du texte.

I. Introduction

1 Au cours d’une recherche qui traitait du sujet de l’articulation de la vie professionnelle et de la vie familiale à partir de l’analyse de trois groupes professionnels, les policiers, les infirmières et les assistants sociaux, nous avons été confronté à une question théorique redoutable : comment donner corps à une entrée par la profession ? (Fusulier et al., 2011). Nous nous sommes alors penché sur les débats sociologiques autour de la notion de profession et avons tiré comme conclusion que la catégorie sociologique “profession” n’était pas facilement maniable, ni très stable. En même temps, il est apparu que l’étude de l’appartenance sociale constituait une porte d’entrée intéressante pour analyser ce que fait la profession à l’individu, et tenter en retour de faire de cet impact une catégorie sociologique.

2 La notion d’ethos nous a alors aidé à théoriser cet impact. Sans du tout croire qu’elle représente la panacée, il semble qu’elle permette une définition a minima de la profession par l’une de ses conséquences sur l’individu. Nous avons alors considéré qu’une profession serait en quelque sorte une configuration sociale, parmi d’autres, liée au monde du travail qui produirait un ethos particulier, qui se traduirait notamment par un sentiment d’appartenance, par un attachement de l’individu à son travail entendu de façon générale.

3 Pour parvenir à cette proposition, nous avons dû faire un détour par une analyse de l’ethos, nous avons dû en quelque sorte le forger conceptuellement. Cet article présente ce travail de conceptualisation. Obervons qu’au commencement de celui-ci, nous avons été surpris de constater que l’ethos ne figurait pas dans deux dictionnaires de sociologie à large diffusion, celui de David et Julia Jary (2000) et celui dirigé par André Akoun et Pierre Ansart (1999). Il ne se retrouvait pas non plus dans l’index thématique général du Dictionnaire critique de la sociologie de Raymond Boudon et François Bourricaud (1986). Pourtant, il a ses lettres de noblesse comme nous le verrons.

4 Orthographié èthos (ou êthos), le terme vient du grec ancien  θος  qui, dans un sens premier, désigne le «séjour habituel, lieux familiers, demeure» ou «coutume, usage», «manière d’être ou habitudes d’une personne, caractère», «disposition de l’âme, de l’esprit», «caractère de la cité» et, par extension, les «mœurs» (Bailly, 1950 :894). Orthographié éthos (du grec θος), il a une acception similaire à celle d’èthos, mais recouvre plus spécifiquement la coutume et l’usage (Ibid. :581). Remarquons que cette distinction sémantique marquée par le type d’accent en langue française semble avoir été peu prise en considération, voire ignorée, par les sociologues ou leurs traducteurs, l’accent ayant d’ailleurs souvent disparu (notamment dans son usage en anglais). Pour notre part, nous situant du point de vue du sociologue, nous écrirons “ethos” pour éviter une assimilation erronée à l’une ou l’autre des acceptions grecques originelles, d’autant plus que dans un contexte sociologique, cette notion établit un lien entre la coutume et le caractère.

5 Notre propos dans cet article est tout d’abord de rechercher le sens que nous pouvons donner à la notion d’ethos à travers le repérage de son application et/ou de sa définition par quelques sociologues qui ont marqué de leur empreinte la discipline. Face à la critique qui peut être formulée à l’encontre d’un recours trop déterministe et massif de l’ethos en décalage avec l’univers social contemporain, dans un second temps, nous proposerons de re-saisir ce concept, dans une perspective transactionnelle, pour en faire un outil conceptuel de l’analyse sociologique actuelle, et en particulier pour l’étude des professions.

II. De la notion au concept d’ethos dans la sociologie classique

6 Il est certain que l’usage fait par Max Weber de la notion d’ethos pour rendre compte du passage de l’«éthique protestante» à «l’esprit du capitalisme» a contribué de façon décisive à faire entrer celle-ci dans le lexique de la sociologie. Ainsi, Weber s’interroge, au sujet du type d’individu requis par une économie capitaliste :

De quelle façon certaines croyances religieuses déterminent-elles l’apparition d’une “mentalité économique”, autrement dit l’ “éthos” d’une forme d’économie ? (Weber, 1964 :11).

7 Ce faisant, l’ethos lui permet d’établir conceptuellement un lien entre «l’esprit de la vie économique moderne» et «l’éthique rationnelle du protestantisme ascétique» (Ibid.).

8 Plus loin, au sujet de l’avarice et de l’idée du devoir pour l’individu de faire augmenter son capital économique, Weber estime que ce n’est pas «une fin en soi» ou «une manière de faire son chemin dans le monde», mais «une éthique particulière» ; et c’est là que le «sens des affaires» traduit «un éthos» (Weber, 1964 :28). Si, «le capitalisme a existé en Chine, aux Indes, à Babylone, dans l’Antiquité et au Moyen Age […], c’est précisément cet éthos qui lui faisait défaut» (Ibid. :29).

9 Au contraire de «l’éthique économique du judaïsme médiéval et moderne»,

le puritanisme soutenait l’éthos de l’entreprise [Betrieb] bourgeoise rationnelle et de l’organisation rationnelle du travail (Weber, 1964 :143).

 Poursuivant son raisonnement, Weber précise :

Un éthos spécifiquement bourgeois de la besogne avait pris naissance. Ayant conscience de se tenir dans la plénitude de la grâce de Dieu, d’être manifestement une créature bénie, aussi longtemps qu’il demeurait dans les limites d’une conduite formellement correcte, que sa conduite morale était irréprochable et que l’usage qu’il faisait de ses richesses n’était en rien choquant, l’entrepreneur bourgeois pouvait veiller à ses intérêts pécuniaires ; mieux, son devoir était d’agir de la sorte. En outre, la puissance de l’ascétisme religieux mettait à sa disposition des ouvriers sobres, consciencieux, d’une application peu commune, faisant corps avec une tâche considérée comme un but voulu par Dieu (Ibid. :146).

10En mobilisant la notion d’ethos pour désigner une conduite économique particulière – «l’éthos économique bourgeois» (Ibid. :159) –, Weber veut souligner son origine éthique, même si celle-ci, à travers la diffusion sociale de la pratique, tend à se métamorphoser dans l’expression laïque d’un esprit, c’est-à-dire que le rapport éthique n’est plus explicitement lié au religieux, car il s’est en quelque sorte sécularisé.

11 Dans un autre ouvrage, Le savant et le politique, Weber reprend la notion d’ethos lorsqu’il évoque «l’ethos de la politique» :

Quelle est, indépendamment des buts qui lui sont propres, la mission que la politique peut remplir dans l’économie globale de la conduite de la vie ? Quel est pour ainsi dire le lien éthique où elle réside ? (Weber, 1963 :67).

12 Nous sommes enclin à avancer que, dans la perspective weberienne, les activités qui contribuent à «l’économie globale de la conduite de la vie» relèvent d’éthiques particulières qui leur sont à chaque fois sous-jacentes ; elles se manifestent sous la forme d’un ethos qui leur est propre. Il s’agit alors de s’interroger sur ce qui constitue un ethos rattaché à une sphère d’activité, à la manière dont Robert King Merton (1973) s’est attelé à caractériser l’ethos scientifique à partir de quatre principes : l’universalisme, le communalisme (concevoir la recherche comme un bien public), le désintéressement et le scepticisme organisé.

13 Ce lien entre activité, éthique et ethos se retrouve également dans les travaux de Norbert Elias, notamment lorsqu’il compare les activités sportives dans la Grèce antique et la pratique sportive moderne :

The ethos of the contenders, the standards by which they were judged, the rules of the contests, and the performances themselves differed markedly in many respects from those characteristics of modern sports (Elias, 1998 :167).

14Tout comme pour Weber, l’usage fait de l’ethos par Elias permet de déceler la rationalité socialement et éthiquement encastrée des comportements. Dans l’un de ses livres majeurs, La société de cour, il distingue deux ethos aux rationalités différentes : un ethos aristocratique basé sur le sens de l’honneur et un ethos économique des couches bourgeoises professionnelles guidées par le profit. Son propos est ici de montrer que le comportement aristocratique dans ce type de société n’est en rien illogique si l’on se donne la peine d’étudier la logique sociale qui lui donne un sens :

L’éthos de l’homme de la cour en tant que membre d’un ordre n’est pas un éthos économique camouflé, il s’en distingue essentiellement. En effet, le sentiment de faire partie d’une élite, d’être auréolé de prestige, bref d’être un homme de la cour est pour l’homme de la cour une fin en soi (Elias, 1985 :95-96).

15 Ce rapport entre l’ethos et la logique d’une couche sociale se retrouve clairement dans l’étude de Pierre Bourdieu et Jean-Claude Passeron (1970) sur la reproduction sociale, en particulier lorsqu’ils soulignent, à propos du système d’enseignement, que le rendement de celui-ci dépend du capital culturel et de l’ethos de classe des élèves. Pierre Bourdieu va d’ailleurs populariser le concept d’ethos de classe en lui donnant la définition suivante :

Le système de valeurs implicites que les gens ont intériorisées depuis l’enfance et à partir duquel ils engendrent des réponses à des problèmes extrêmement différents (Bourdieu, 1984 :228).

 Bourdieu va alors faire de l’ethos l’une des trois composantes de l’habitus au côté de l’eidos et de l’hexis. Il s’en explique :

J’ai employé le mot d’ethos, après bien d’autres, par opposition à l’éthique, pour désigner un ensemble objectivement systématique de dispositions à dimension éthique, de principes pratiques (l’éthique étant un système intentionnellement cohérent de principes explicites) […] nous pouvons avoir des principes à l’état pratique, sans avoir une morale systématique, une éthique (Ibid. :133).

16 Cependant, donnant priorité au concept d’habitus, et ne souhaitant plus fragmenter celui-ci en plusieurs dimensions, il prendra distance avec le concept d’ethos (Ibid.). Il n’en demeure pas moins que pour Pierre Bourdieu, le recours à cette famille de concepts – ethos, habitus et hexis – relève d’une intention théorique où il s’agit…

[…] d’échapper à la fois à la philosophie du sujet, mais sans sacrifier l’agent, et à la philosophie de la structure, mais sans renoncer à prendre en compte les effets qu’elle exerce sur l’agent et à travers lui (Bourdieu, 1992 :97).

  • 1  La négociation peut en être une, mais il en existe d’autres plus informelles et continues. Voir Fu (...)

17 Cette intention théorique est éclatante dans l’approche par la transaction sociale proposée par Jean Remy, Liliane Voyé et Émile Servais dans leur ouvrage Produire ou reproduire (1978). En effet, d’un point de vue analytique, autour d’un problème collectif donné, la transaction sociale prend en considération les paramètres “structurels” (le structurel est producteur de contraintes et de possibilités objectives) et “structuraux” (le structural est producteur de sens, de la perception du normal et du possible) pour étudier de façon articulée deux logiques qui s’expriment dans la pratique sociale : une logique d’appropriation et une logique de production. Cette étude nécessite alors de saisir les acteurs impliqués dans l’échange que suppose la résolution du problème, leur position de départ structurellement et structuralement définie, les formes1 et les contenus des échanges ainsi que le produit qui en découle (par exemple un compromis) et ses effets objectifs et intentionnels qui reconfigurent peu ou prou les conditions structurelles ou structurales à la base d’une nouvelle séquence transactionnelle. La transaction sociale fait place à deux “plans d’analyse” en interstructuration : celui de l’événement ou de la situation d’une part, et celui du contexte de structuration de la situation d’autre part, et ce tenant compte de la dimension temporelle et des effets producteurs ou reproducteurs.

18 Cette approche par la transaction sociale intègre le concept d’ethos en tant que…

[…] médiateur entre les structures et les effets structurels et structuraux d’une part et les logiques d’action intentionnelle et objective d’autre part (Remy/Voyé/Servais, 1978 :311).

  • 2  La conscience des possibles ne recouvre pas l’ensemble des possibles.

19 Pour Remy et al., l’ethos et les différences d’ethos n’ont pas pour origine des facteurs psychologiques ou individuels, mais bien des facteurs collectifs liés «aux différences d’insertion qui expliquent les différences de pratiques» (Ibid.). Ces insertions sont, pour Remy et al., assimilées aux positions dans la stratification sociale ; ils utilisent dès lors le concept d’ethos de position. Du fait de ses caractéristiques structurelles et structurales, chaque position socialement située est porteuse d’une disposition psycho-affective, éthique et cognitive à appréhender le possible2, le normal et le désirable.

20 L’ethos recouvre à la fois cette disposition et son actualisation contingente qui donnent sens et forme à des pratiques/comportements (une matrice de comportements). Il est dès lors considéré comme “un principe organisateur de pratiques”. Pour les théoriciens de la transaction sociale, s’intéresser à l’ethos revient à prendre en compte l’articulation entre le social (les interdépendances et les interactions), le culturel (les significations collectives, le symbolique) et l’affectif (le ressenti et les désirs) dans l’engagement pratique. L’ethos ne suppose pas pour autant une prédétermination des pratiques, mais davantage une propension à engendrer un type de pratique, notamment car il constitue une modalité par laquelle des «possibilités objectives sont ou non transposées en espérances subjectives» (Remy/Voyé/Servais, 1980 :279). Cette transposition met en jeu les trois dimensions susmentionnées : une conscience des possibles, une conception du normal et un vécu émotionnel. En d’autres termes, l’acteur peut très bien percevoir un “possible”, mais l’interpréter comme étant illégitime et ne pas en faire un objet de désir, ou alors s’en saisir malgré tout en courant le risque d’être en dissonance avec l’ethos du milieu social. Dans ce cas, il prend donc le risque d’être désapprouvé par autrui ainsi que celui de ressentir de la honte ou de la culpabilité. Le passage d’une conscience honteuse à une conscience fière est l’un des enjeux du changement social pour Remy et al.

21 Si cette définition s’inspire de la sociologie bourdieusienne, l’approche par la transaction sociale s’intéresse cependant davantage à la logique productive de l’ethos (ce qu’il contribue à produire), qu’à la logique de production de l’ethos (les conditions d’expérience qui génèrent un ensemble de dispositions durables chez les personnes).

22 Comme nous l’avons critiqué par ailleurs (Fusulier/Marquis, 2008, 2009b), la transaction sociale, dans sa définition originelle, est néanmoins marquée par le contexte historique de sa formulation (la seconde moitié des années 1970), qui amène ses théoriciens à assimiler l’ethos de position à un ethos de classe (les positions supérieures, la classe moyenne et le milieu ouvrier) et à prétendre dégager «la matrice globale de comportements typiques de chaque position» (Remy/Voyé/Servais, 1978 :345). Cette vision est datée à l’heure du brouillage des classes sociales (Dubet/Martuccelli, 1998), de la modernité liquide (Bauman, 2000) et de l’homme pluriel (Lahire, 1998).

23 Finalement, face aux usages qu’en ont fait Max Weber, Norbert Elias, Robert King Merton, Pierre Bourdieu et Jean Remy et al., le concept d’ethos ne relève-t-il pas du lexique de ce que François Dubet (1994) appelle la «sociologie classique» ? Suivant cet auteur, cette sociologie, qui serait dépassée, a au centre de sa conception l’idée de…

L’identité de l’acteur et du système par le biais de la notion d’action […] La société est un système d’action et l’action résulte de l’intériorisation du système par les acteurs. L’acteur, lui, est un individu d’autant plus autonome qu’il est socialisé. Enfin, cette sociologie classique “croit” à l’existence d’une “société” qui est une représentation très particulière du social (Dubet, 1994 :50).

24 Certes, le monde s’est transformé, mais surtout le regard sociologique – ainsi que la manière de faire de la sociologie – a largement changé. Il est plus attentif aux biographies, à la subjectivité, au suivi pragmatique des actes, acteurs et actants, etc. Il met davantage au centre de son attention la façon dont les individus gèrent différentes logiques de l’action, recourent en situation à des principes de justice, puisent dans un stock de modèles, passent des épreuves, se meuvent dans un monde incertain, etc. Si ce versant de la sociologie est aujourd’hui important, et cela se comprend eu égard aux transformations contemporaines et aux cycles du débat scientifique, peut-il pour autant s’affranchir de l’autre versant où des forces structurelles, des codes culturels, des règles institutionnelles et organisationnelles, des dispositifs socio-moraux, des processus de socialisation, etc., pèsent toujours lourdement sur le système de personnalité, les jugements et comportements individuels et collectifs ? Formuler la question, c’est y répondre. Certainement qu’une vision monolithique de l’ethos comme expression de l’intériorisation d’un seul principe organisateur de pratiques, dessinant une matrice globale des comportements, n’est plus adéquate. Cependant, faut-il se passer pour autant de cet outil conceptuel ou le repenser pour en faire un concept heuristique en vue d’une appréhension dialectique et dynamique des capacités d’action et des formes sociales toujours socialement et historiquement situées, partiellement structurées, partiellement indéterminées ?

III. Balises pour appréhender l’ethos dans une perspective transactionnelle

25 Une entrée par l’ethos revient, en continuité avec la sociologie classique, à prendre en considération l’existence de milieux sociaux qui sont structurellement et structuralement constitués, historiquement sédimentés, pour qu’ils soient des lieux de socialisation, c’est-à-dire des lieux relationnels qui favorisent, par l’expérience et l’apprentissage, l’intériorisation de normes, de valeurs, de principes éthiques qui permettent d’adopter un rapport particulier au monde, notamment en attribuant une valence à celui-ci sur le registre du “bien”, du “juste”, du “normal” (Marquis/Fusulier, 2008).

26 Pour Guy Bajoit,

En pratiquant ces relations, les individus sont socialisés et se socialisent : ils apprennent – par calcul, par habituation, par conviction et par identification – à occuper des positions sociales dans les relations, à y participer et à appartenir à des identités collectives (Bajoit, 2010 :96).

  • 3  Dont le périmètre est a priori extrêmement variable, dépendant de l’échelle du phénomène observé ( (...)

27 De ce fait, contrairement à une approche par les conventions ou à une sociologie pragmatique n’impliquant pas nécessairement cette épaisseur socio-historique, une entrée par l’ethos postule, pour être applicable, la présence d’un “espace déjà-là”3 qui imprègne avec plus ou moins de profondeur le système de personnalité de celui qui s’y insère durablement. Cette reconnaissance d’un univers social non entièrement liquéfié, même à l’heure de la flexibilité, et d’acteurs socialisés n’est pas pour autant antinomique d’une vision où les acteurs sont également compétents, réflexifs ou stratégiques, comme le soulignaient déjà Michel Crozier et Ehrard Friedberg dans le chapitre de leur livre L’acteur et le système consacré à la culture (1977 :196-224). Pour reprendre Guy Bajoit,

[le] conditionnement constitue toujours le fondement premier de la vie sociale, sans lequel il ne saurait y avoir ni acteur, ni sujet, ni liberté possibles (Bajoit, 2010 :97).

28 Pour illustrer notre propos, partons du concept de genre. Contre l’argument naturaliste, qui a favorisé l’oppression des femmes à travers l’histoire, les féministes anglo-saxonnes (Oakley, 1972 ; Scott, 1988) et francophones (Delphy, 1991 ; Mathieu, 1991 ; Hirata/Kergoat, 1998) distinguent le sexe biologique “mâle/femelle” et le genre “masculin/féminin”. Ce dernier exprime les constructions sociales autour ou en lien avec le sexe biologique et les mécanismes par lesquels on est identifié et on s’identifie comme appartenant au groupe social féminin ou masculin (Fusulier/Cornet, 2008). Naître garçon ou fille, ne fut-ce que dans nos sociétés occidentales contemporaines, va dès lors faire l’objet d’une socialisation tendanciellement différentiée qui vise à inculquer des principes organisateurs partiellement distincts entre les sexes, soit ce que nous pourrions nommer un ethos de genre (masculin ou féminin, dont les déclinaisons peuvent être variées). Il s’agit donc d’une socialisation à large spectre, d’un ethos en quelque sorte transversal à la population qui participe de sa division et de sa hiérarchisation.

29 Dans le même temps, cet ethos de genre est aussi fonction d’une socialisation correspondant aux grandes strates sociologiques au sein d’une société. De ce fait, une thématisation en termes d’ethos de position demeure pertinente, même si la circonscription des positions n’est guère aussi évidente qu’elle pouvait le sembler il y a ne fut-ce que trente ans. Néanmoins, force est de reconnaître que la naissance et l’éducation d’une fille ou d’un garçon dans des milieux hautement qualifiés n’ont pas entièrement les mêmes effets socialisateurs et d’opportunité d’insertion que la naissance et l’éducation dans des milieux faiblement qualifiés. De surcroît, des insertions dans des “déjà-là” moins généraux que les positions sociales ponctuent de toute évidence l’existence des personnes de façon plus localisée. Dans cette perspective, un établissement scolaire, un groupe professionnel, une entreprise, une association ou un réseau institués, sont susceptibles, mais pas nécessairement, d’être les véhicules d’ethos qui se reproduisent et se produisent via notamment l’insertion en leur sein, les opérateurs de socialisation en vigueur et les investissements de forme engagés.

30 Utilisé de la sorte, l’ethos peut servir de concept heuristique pour saisir et interpréter des récurrences de comportements rapportées à des catégories sociales et à des milieux sociaux. Il peut porter à la fois sur des niveaux très étendus des sociétés humaines (l’ethos du capitalisme ou l’ethos de genre par exemple), des niveaux plus stratifiés avec une problématisation en termes d’ethos de position, ou segmentés lorsqu’on parle d’ethos scientifique, d’ethos politique, d’ethos professionnel…

  • 4  Ce qui caractérise selon Bernard Lahire «l’homme pluriel» contemporain (Lahire B., 1998).
  • 5  Pour Claude Dubar, cette double transaction est au cœur du processus de construction identitaire. (...)

31 Bien que certains principes puissent apparaître plus imprégnants que d’autres du fait de la puissance, de l’étendue et/ou de la profondeur de leurs zones d’influence socialisatrice, la pluralité des insertions qu’un même individu est amené à effectuer au cours de son parcours de vie4 oblige ce dernier à entrer en transaction avec divers principes organisateurs de pratiques : soit ceux qu’il a déjà assimilés – ce qui passe par une transaction biographique pour reprendre la terminologie de Dubar (1995) –, soit ceux qu’il éprouve dans un nouvel espace social dans lequel il s’insère (la transaction relationnelle selon Dubar (Ibid.)5. Des dissonances ou des consonances entre principes peuvent alors exister. Ainsi, un ethos de position peut favoriser une insertion aisée dans un milieu social donné ou créer de la dissonance avec celui-ci.

IV. Ethos et vie professionnelle

32 À cette étape du raisonnement, arrêtons-nous un instant sur le concept d’ethos professionnel pour nous intéresser à son caractère heuristique. Le concept d’ethos nous permet de réfléchir une situation, un dispositif à partir de certaines de ses conséquences sur les individus ou les groupes. Comme annoncé, il invite donc à réfléchir la profession à partir de ce qu’elle “fait” à ses membres. Pour Bernard Zarca, l’ethos professionnel renvoie aux…

  • 6  Pour notre part, nous serions enclin à éviter d’étendre le concept d’ethos aux codes esthétiques, (...)

[…] dispositions acquises, par expérience et relatives à ce qui vaut plus ou moins sur toute dimension (épistémique, esthétique, sociale, etc.) pertinente dans l’exercice d’un métier […] (Zarca, 2009 :352)6.

 Il consiste à…

[…] apprendre non seulement ce qu’il convient de faire pour respecter les règles non écrites de son art, mais encore comment échanger avec ses confrères et les juger en tant que professionnels : ce qui fait qu’on les admire, qu’on les estime ou qu’on les méprise (Ibid.).

33 Selon ce point de vue, l’ethos professionnel constitue un dénominateur commun à un ensemble d’individus pratiquant une activité similaire qui se reconnaissent et sont reconnus comme membres d’un groupe professionnel, ce qui n’empêche pas ce dernier d’être stratifié et segmenté. Est-ce que tout groupe professionnel se caractérise par un ethos ? Probablement pas ! Cependant, il est frappant de noter que la littérature autour de la psychodynamique du travail considère qu’une des premières conditions de ce développement est une forme de stabilité :

Le travail ne remplit sa fonction psychologique pour le sujet que s’il lui permet d’entrer dans un monde social dont les règles soient telles qu’il puisse s’y tenir. Sans loi commune à faire vivre, le travail laisse chacun de nous face à lui-même. C’est tout le contraire de ce qui est nécessaire à l’avènement d’une mobilisation subjective (Clot, 1999 :9).

34 Dans l’analyse endogène d’un groupe, poser la question de l’existence de règles communes et d’un ethos générique, de sa logique de production et de sa logique productive paraît une piste de recherche intéressante en soi. Elle mérite d’ailleurs d’être couplée avec celle de la présence d’ethos plus spécifiques à des segments ou des strates internes au groupe, ainsi qu’à la dynamique transactionnelle entre différents ethos entrant en consonance ou en dissonance, voire en concurrence.

35 Une entrée par l’ethos professionnel, mais c’est aussi valable par l’ethos en général, rend tout autant possible une analyse de ce qui se noue entre ce principe organisateur de pratiques et des règles organisationnelles qui encadrent formellement ou implicitement les pratiques. Ces règles peuvent être une émanation de l’ethos et en relation de consonance (des règles déontologiques par exemple), ou se présenter comme une contrainte à l’actualisation de l’ethos dont la personne est porteuse et, de ce fait, être dans une relation dissonante. Comme le souligne Anne Joro (2009) au sujet de l’ethos professionnel, la question se pose du «vouloir agir» et du «pouvoir d’agir» «comme professionnel» (Joro, 2009 :3). Dès lors, l’ethos professionnel peut être générateur d’une critique ou d’un malaise à l’égard d’un cadre organisationnel ou situationnel dans lequel la pratique se déroule : «je voudrais agir de telle façon (en professionnel par exemple), mais je n’en ai pas vraiment la possibilité». Quelles transaction et logique d’action découlent de cet hiatus ?

36 L’application du concept d’ethos à la sociologie des groupes professionnels (Demazière/Gadéa, 2010) jouerait comme un prisme pour l’analyse des jugements et des comportements des membres d’un groupe pouvant être spatialement, voire temporellement, disjoints. Non seulement, elle stimule à regarder si les attitudes individuelles sont, par leur similarité, la manifestation d’une attitude collective, mais aussi à interpréter les raisons de cette dernière : ne serait-elle que l’unique fruit de contraintes matérielles ou organisationnelles identiques, d’un rôle social au script strict accompli sous un contrôle sévère, de l’agrégation de comportements intéressés et calculateurs du fait de la confrontation aux mêmes enjeux ? Si pas, serait-elle le résultat d’autre chose qui lie les personnes, des significations collectives partagées et un ethos professionnel générique ou spécifique ? En d’autres mots, si la pratique professionnelle et l’appartenance qui en découle ne laissent pas l’individu indifférent, ce ne serait pas seulement pour des raisons instrumentales, mais aussi parce qu’elles influencent sa cartographie du possible, du normal et du désirable.

37 Sans doute est-il particulièrement ardu d’isoler ce “principe agissant” attaché à l’insertion professionnelle. On l’a vu, l’ethos professionnel relève d’un segment social et, par ce fait même, il n’est pas sans rapport avec des ethos plus transversaux : de genre ou de position en particulier. Nous pouvons très bien imaginer qu’un groupe professionnel traditionnellement constitué très majoritairement d’hommes va développer un ethos professionnel composant avec l’ethos de genre masculin en promouvant par exemple la norme de longues heures de travail, la figure du professionnel héroïque entièrement disponible pour sa mission professionnelle et valorisant la dimension technique de l’acte professionnel, etc. Une femme, porteuse d’un ethos de genre féminin se déclinant entre autres en termes d’un sentiment de forte responsabilité vis-à-vis des tâches familiales et des conduites qui y sont attachées, qui s’insère dans ce groupe professionnel va devoir mettre en transaction son ethos de genre et l’ethos professionnel lui-même sexué : l’assimiler, s’en accommoder, ou le contester. Cette transaction peut générer des attitudes variées en fonction du degré d’assimilation des codes de la profession : par exemple, réduire le désir de maternité et faire montre d’un surinvestissement professionnel, ou s’orienter vers des segments professionnels plus féminisés et davantage compatibles avec un ethos de genre féminin (du fait d’un ethos professionnel spécifique) tout en composant avec, et en assimilant, des traits de l’ethos professionnel générique.

  • 7  Ce que nous avons pu observer dans les statistiques, par exemple lorsque les mères appartenant au (...)

38 Restons dans ce cas de figure et introduisons l’existence de mesures légales de conciliation travail/famille, comme un droit au congé parental et à la réduction temporaire du temps de travail, c’est-à-dire un “possible” au niveau institutionnel : quel rapport une jeune maman (ce qui peut valoir pour un jeune papa) va-t-elle nouer avec ce “possible” ? Suivant notre analyse, l’ethos aurait potentiellement un impact sur l’articulation de la vie professionnelle et de la vie familiale, ne fut-ce que par la conscience des dispositifs, la valence accordée à leur utilisation et la perméabilité aux remarques des pairs. Admettons d’abord que cette mère ait conscience de ce droit (certains milieux professionnels étant d’ailleurs susceptibles de ne pas favoriser la conscience de ce “possible”) ; nous pouvons supputer qu’elle va lui accorder, de façon consciente ou non, une valence en termes de légitimité au sein de son milieu de travail : «il est légitime de l’utiliser dans ma profession, ou peu légitime». Si ce “possible” est perçu ou vécu comme illégitime, nous pouvons supposer que cette mère sera encline à ne pas y recourir7 ; si elle s’en saisit malgré tout parce que c’est un droit et/ou qu’elle ne peut faire autrement (pour diverses raisons : manque de places dans des crèches, pas de soutien conjugal ou intergénérationnel, conviction qu’une mère doit être près de son enfant en bas âge, etc.), nous pouvons anticiper à la fois une forme feutrée ou explicite de désapprobation de la part de ses pairs et/ou de sa hiérarchie et le vécu d’un sentiment de tension interne. La jeune mère pourrait dès lors adopter différents types de comportements. Nous référant à la fameuse distinction faite par Albert Hirschman (1972) entre loyauté, protestation et défection, elle pourrait : intensifier son travail durant les périodes prestées pour compenser les périodes d’absence, se mettre en retrait ou relativiser son engagement professionnel, ou contester le principe organisateur au nom d’autres principes, etc. En somme, l’ethos se donne ici comme une médiation entre le niveau légal (le droit à prendre un congé parental) et les comportements individuels et collectifs à l’égard de ce droit, même si ceux-ci ne sont pas univoques. Il ouvre de ce fait de nouvelles perspectives d’analyse des médiations sociales et d’articulation avec d’autres concepts tels que, par exemple, celui de la “capabilité” (capability) forgé par Amartya Sen (2003). En effet, l’ethos pourrait intervenir comme un facteur social et personnel de conversion positive ou négative d’une ressource (une mesure légale dans le cas évoqué) en “fonctionnement effectif”.

39 L’ethos, et l’ethos professionnel en l’occurrence, n’est pas pour autant intangible, car il est aussi dépendant de la transformation des paramètres structurels et structuraux du contexte de son inscription. Une nouvelle législation (par exemple, un régime d’assurance parentale plus attractif ou obligatoire), des changements dans la morphologie socio-démographique du milieu d’insertion (par exemple une féminisation accrue du milieu, l’entrée massive d’une nouvelle génération véhiculant des normes et valeurs en tension avec les codes et ethos institués,…), etc., sont autant de données qui poussent à l’enclenchement d’une nouvelle séquence transactionnelle au cours de laquelle se jouent la rencontre et la composition du nouveau et de l’ancien autour des définitions du possible, du normal et du désirable. En aval de cet échange social, opérant sans doute de manière diffuse et continue, même s’il est ponctué de moments de négociation, se dessine une logique de production dont les effets peuvent être reproducteurs ou transformateurs de l’ethos.

V. Conclusion

40 Cette contribution autour du concept d’ethos n’épuise évidemment pas le propos. A tout le moins, elle permet de clarifier son signifié et son lien avec la question éthique ; elle permet également de porter un regard critique sur l’intérêt qu’il peut encore avoir pour l’analyse sociologique contemporaine. L’ethos se présente comme l’un des concepts interprétatifs qui permettent de saisir une récurrence de comportements de la part d’acteurs partageant une même insertion sociale. Il a surtout une vocation heuristique pour penser la relation entre l’histoire collective et les logiques d’action, l’insertion dans un milieu social et les pratiques, et ce dans une perspective davantage structurationniste que déterministe.

41 Comme nous le signalait Didier Demazière suite à la lecture d’une version pré-finale de ce texte, s’il est vrai que l’ethos renvoie aux expériences biographiques, il est surtout pensé en termes d’inscription catégorielle (position, segment, organisation, profession…). Or, à l’heure d’aujourd’hui, l’ethos pourrait se constituer à travers des compositions réticulaires et trajectorielles multiples. L’articulation de la logique de production de l’ethos avec sa logique productive pourrait éclairer sous un angle renouvelé l’effet de la circulation des personnes entre les milieux et contextes sociaux à travers les parcours biographiques et les carrières qui sont partiellement “ancrés”, partiellement en “apesanteur” par rapport aux contextes de leur inscription physique.

42 De façon opérationnelle, aborder l’ethos nécessite une prise en considération non seulement des caractéristiques du milieu étudié lato sensu (intégrant par exemple des milieux réticulaires), mais aussi des discours et jugements individuels et collectifs et bien entendu des pratiques. La question de l’ethos paraît particulièrement féconde dans une démarche comparative, c’est-à-dire dans la confrontation des différences d’insertion et des différences de pratiques. Probablement que plus les milieux sont semblables en partageant des traits communs, plus l’ethos devient un instrument intellectuel de discernement de leur spécificité.

43 En somme, loin d’être un concept obsolète à reléguer dans une “sociologie classique” dépassée, l’ethos garde selon nous toute sa pertinence dans la boîte à outils théoriques du sociologue et de l’anthropologue d’aujourd’hui.

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Notes

1  La négociation peut en être une, mais il en existe d’autres plus informelles et continues. Voir Fusulier B., Marquis N., 2009a.

2  La conscience des possibles ne recouvre pas l’ensemble des possibles.

3  Dont le périmètre est a priori extrêmement variable, dépendant de l’échelle du phénomène observé (et de l’échelle d’observation du chercheur).

4  Ce qui caractérise selon Bernard Lahire «l’homme pluriel» contemporain (Lahire B., 1998).

5  Pour Claude Dubar, cette double transaction est au cœur du processus de construction identitaire. Il serait à cet égard utile de s’interroger sur le concept d’identité et son articulation avec celui d’ethos.

6  Pour notre part, nous serions enclin à éviter d’étendre le concept d’ethos aux codes esthétiques, à tout le moins si ceux-ci sont pensés indépendamment d’un rapport éthique sous-jacent (où le juste et l’injuste, le bien et le mal ne croisent pas le beau et le laid).

7  Ce que nous avons pu observer dans les statistiques, par exemple lorsque les mères appartenant au groupe professionnel des policiers utilisent ce “possible” comparativement moins que celles qui sont infirmières ou assistantes sociales (Fusulier B. et al., 2011).

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Pour citer cet article

Référence électronique

Bernard Fusulier, « Le concept d’ethos. », Recherches sociologiques et anthropologiques [En ligne], 42-1 | 2011, mis en ligne le 29 septembre 2011, consulté le 06 mars 2014. URL : http://rsa.revues.org/661

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Auteur

Bernard Fusulier

GIRSEF-CIRFASE-UCL.

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